L'homme, dans ce système lié à l'époque et qui n'a pas été voulu en tant que tel, n'est apprécié que pour son utilité économique, il devient alors "la plus précieuse des matières premières" ! Dans le langage des entreprises, on a remplacé le mot "personnel" (avec la racine personne) par le terme de "ressource humaine" : cela traduit bien la déshumanisation à peine consciente de notre vocabulaire ! L'homme est une ressource donc un "Stück", un élément utilisable au même titre qu'un boulet de charbon dans un stock d'anthracite ! Il doit avant tout être interchangeable pour pouvoir être requis le plus facilement qui soit !
L'oligarchie régnante, qui administre la logique du Gestell pour son profit et pour satisfaire sa volonté de puissance, va donc appliquer sa "gouvernance" à rendre le plus possibles les hommes interchangeables : toutes les distinctions essentielles doivent s'effacer, à commencer par celles entre les hommes et les femmes. C'est là la source de l'obsession de la fameuse "parité" : on s'acharne à vouloir que les listes de candidats aux élections soient composées pour moitié d'hommes et de femmes et on se garde bien d'évoquer les vraies questions politiques, à savoir que les élus sont dessaisis de leurs pouvoirs par l'administration et que le citoyen est devenu totalement impuissant à influencer le système de décision de la gouvernance politique. On détourne les débats vers des sujets sans importance mis en avant de façon artificielle. Tout ce qui distingue les êtres humains doit être éliminé dès lors que cela peut gêner le caractère interchangeable que les hommes doivent avoir pour être de parfaites matières premières.
L'homme du Gestell doit donc avoir quatre caractéristiques :
- ne pas avoir de racines (ni race, ni nation, ni religion notamment) ;
- ne pas avoir d'idéal : il doit être un consommateur et un producteur matérialiste et relativiste prêt à gober tous les produits lancés sur le marché (y compris les produits bancaires permettant de l'endetter et donc de mieux le soumettre) ;
- ne pas avoir de religion hors celle de son propre ego, pour être plus facilement isolé donc manipulable ;
- ne pas avoir de personnalité afin de se fondre dans la masse (il doit donc être éduqué de façon purement technique et utilitaire sans culture générale lui permettant de se situer comme homme libre) ;
Cyniquement, l'idéologie des droits de l'homme est utilisée pour détruire tout ce qui fait la spécificité des hommes, pour mieux asservir l'homme aux besoins du Gestell tout en prétendant protéger ses libertés fondamentales ! Un des exemples les plus emblématiques fut le cas de cette femme députée néerlandaise Mme Ayaan Hirsi Magan menacée de mort par l'islamisme radical. Ses voisins ont obtenu l'expulsion de celle-ci de son logement au nom des droits de l'homme parce qu'elle faisait subir un risque d'attentat sur eux. Ecoeurée, celle-ci a quitté les Pays-Bas !
L'homme interchangeable dont le Gestell a besoin n'a rien à voir avec le citoyen animé par l'esprit civique, la conscience de ses libertés et l'amour de sa patrie. Or, c'est le citoyen qui est le porteur de la démocratie véritable. Par contre, l'homme du Gestell ressemble à ce "dernier homme" annoncé par Nietzsche dans Ainsi parlait Zarathoustra !
"Hélas ! Vient le temps du plus méprisable des hommes qui ne sait plus se mépriser lui-même ! Voyez ! Je vous montre le dernier homme. Qu'est-ce que l'amour ? Qu'est-ce que créer ? Qu'est-ce que la nostalgie ? Qu'est-ce qu'une étoile ? demander le dernier homme et il cligne de l'oeil ! La terre est devenue plus petite et sur elle sautille le dernier homme qui rend tout plus petit. Sa race est aussi solide que celle du puceron. Le dernier homme est celui qui vit le plus longtemps."
"Nous avons inventé le bonheur, disent les premiers hommes et ils clignent de l'oeil. Ils ont abandonné le pays où la vie était dure, car on aime la chaleur. On aime encore son voisin et on se frotte à lui car on a besoin de chaleur. Devenir malade ou méfiant passe chez eux pour un péché." On respecte avant tout le principe de précaution ! "Fou celui qui butte encore sur les pierres et sur les hommes. Un peu de poison de-ci, de-là qui procure des rêves agréables. Et beaucoup de poison au final pour avoir une mort agréable. On travaille encore car c'est une distraction. Mais on a soi que la distraction reste modérée. On ne devient plus ni riche ni pauvre. Les deux sont trop astreignants. Qui veut encore commander ? Qui veut encore obéir ? Tout cela est trop fatigant. Pas de berger et un seul troupeau ! Chacun veut la même chose et tous sont égaux ; qui pense autrement sera interné !"
"Autrefois, tout le monde avait tout faux disent les plus malins et ils clignent de l'oeil. On est malin et l'on sait tout ce qui est arrivé : on n'en fini pas de se moquer. On se querelle mais on se réconcilie bientôt de peur que cela ne gâte l'estomac ! On a son petit plaisir pour le jour et son petit plaisir pour la nuit : mais on honore la santé. Nous avons trouvé le bonheur, disent les derniers hommes et ils clignent de l'oeil !"
Ici s'arrête le discours de Zarathoustra qui est interrompu par les cris de la foule : "donne-nous ce dernier homme, ô Zarathoustra ! Nous te faisons quitte du surhomme ! Et tout le peuple se réjouissait et claquait de la langue ! Zarathoustra devint triste et dit : je ne suis pas la bouche faite pour ces oreilles (...) Ils me regardent et rient, mais dans leur rire, ils me haïssent ; il y a de la glace dans leur rire."
Tout le système médiatique et éducatif est là pour modeler la personnalité des Français et les transformer en outils interchangeables du Gestell. Le projet, inhumain en soi, est bien celui-là : apprivoiser ces animaux sauvages que seraient les citoyens par la consommation de biens matériels et en flattent l'égalitarisme.
Yvan Blot, L'oligarchie au pouvoir