Le suspense n’aura pas duré longtemps. Les cardinaux électeurs, qui avaient paru prendre leur temps durant les congrégations générales pour décider de la date du début du conclave, n’auront eu besoin que de cinq scrutins pour se mettre d’accord et élire le successeur de Benoît XVI, dont la renonciation le 11 février avait ouvert un chapitre inédit dans l’histoire de la papauté. Une élection rapide qui donne au nouveau pape l’assurance d’avoir la pleine confiance de ses frères. Ils ont également déjoué les pronostics, même si la personnalité de Jorge Mario Bergoglio, archevêque de Buenos Aires, n’est certes pas inconnue : son nom était, dit-on, apparu lors du précédent conclave. Ils auront élu un non-Européen, un jésuite, un homme de 77 ans, de santé fragile, simple.
En expliquant les raisons de son retrait, Benoît XVI avait en quelque sorte établi une « feuille de route » pour son successeur. Il serait un homme intellectuellement vigoureux, ayant une expérience pastorale, capable d’organiser et de décider, apte à mener le dialogue avec son temps et avec les autres cultures. Il lui faudra, bien sûr, réorganiser la Curie, le gouvernement central de l’Église éprouvé par l’affaire Vatileaks ; mais surtout donner confiance aux fidèles catholiques inquiets de vivre dans des sociétés de plus en plus indifférentes à Dieu, et permettre à ceux qui ne se reconnaissent pas dans la figure du Christ de trouver dans l’Église catholique une force agissante pour le bien commun des peuples, pour la paix et la justice, la liberté, le respect de la vie…
La succession est lourde. D’autant plus que le pape émérite, à qui François a fait immédiatement référence, sera présent dans l’enceinte du Vatican. Le nouveau pape saura imprimer sa marque particulière. Il ne faudra pas chercher à comparer, à chercher les différences et les ressemblances, ni à spéculer sur la durée du pontificat. Mais lui laisser le temps d’habiter son rôle et sa mission, ce service de l’Église universelle. Sans oublier que l’Église catholique se manifeste au travers de tous ses fidèles, de toutes ses communautés de par le monde. Car ce sont ces croyants qui, avec le pape, portent la responsabilité de faire vivre le message du Christ dans le monde d’aujourd’hui. L’élection d’un Argentin, issu de cette Amérique latine où vit ardemment la foi catholique, en est le signe.
Dominique Quinio