Le 3 novembre 2012, Brasserie La Manivelle Die (26). Un documentaire d’Antoine Costa et Florian Pourchi (77’) (www.mouton-lefilm.fr)
Source Aujourd'hui le nanomonde
La modernisation de l’agriculture d’après guerre portée au nom de la science et du progrès ne s’est pas imposée sans résistances. L’élevage ovin, jusque là épargné commence à ressentir les premiers soubresauts d’une volonté d’industrialisation. Depuis peu une nouvelle obligation oblige les éleveurs ovins à puçer électroniquement leurs bêtes. Ils doivent désormais mettre une puce RFID, véritable petit mouchard électronique, pour identifier leurs animaux à la place de l’habituel boucle d’oreille ou du tatouage. Derrière la puce RFID, ses ordinateurs et ses machines il y a tout un monde qui se meurt, celui de la paysannerie. Dans le monde machine, l’animal n’est plus qu’une usine à viande et l’éleveur un simple exécutant au service de l’industrie. Pourtant certains d’entre eux s’opposent à tout cela. La lutte des éleveurs contre le puçage RFID des moutons peut apparaître comme un combat de plus. Pour certains c’est un combat comme un autre, un combat contre les obligations (la dernière en date étant celle de l’obligation de vacciner contre la FCO) Cependant comme nous l’avons constaté dans nos entretiens avec les éleveurs il ne s’agit pas d’une obligation supplémentaire. C’est une volonté à moitié camouflée d’industrialiser l’élevage ovin et caprin, une volonté de contrôle total afin d’amener l’élevage vers d’autres aménagements futurs, sur le terrain de la génétique notamment. (Voir à ce propos la loi sur les reproducteurs certifiés) Camouflée, car selon ceux qui imposent la puce ( État, autorités sanitaires et vétérinaires ), la puce serait un outil de traçabilité, donc de sécurité pour le consommateur et diminuerait la pénibilité du travail pour l’éleveur. Pour aborder cette problématique nous avons choisi le secteur ovin, les moutons, l’élevage des agneaux, des brebis… Là où l’imaginaire commun n’arrive pas à se représenter le métier de berger derrière un ordinateur équipé d’un lecteur de données pour contrôler ses bêtes, c’est pourtant cette réalité qui domine l’élevage moderne. C’est probablement ces hommes, éleveurs, bergers, qui historiquement ont le plus résisté contre l’industrialisation du secteur agricole et ce n’est pas anodin si ce sont eux qui se retrouvent moteurs de la lutte contre ces nouvelles obligations qui apparaissent. Les RFID sont le point de départ du projet de ce film documentaire. Le puçage se généralise autour de nous, les informations se recoupent, la carte d’identité biométrique s’impose. À chaque fois avec de bon prétextes, de bonnes raisons, de bons arguments. Avec la directive européenne concernant le puçage obligatoire des cheptels ovins et caprins, nous assistons à la première obligation d’envergure de puçage du vivant. Une expérimentation grandeur nature dont les industriels se flattent. C’est dans ce contexte que s’inscrit ce film, mais nous avons volontairement choisi de le laisser en toile de fond. Nous consacrerons la majeure partie du documentaire aux paroles d’éleveurs sans commentaires. Un peu à la manière des tribunes libres dans la presse nous écouterons les récits de ceux qui vivent ces transformations et luttent contre les obligations. Nous revenons avec chaque éleveur sur les raisons qui les ont amenés à ce métier, à cette passion. Nous partageons avec eux leurs inquiétudes mais aussi leurs espoirs. A l’écoute des bergers, des éleveurs nous tentons de comprendre ce métier ; et à travers leurs regards, nous ouvrons les yeux sur le danger d’une société industrielle et frénétique.
Source Aujourd'hui le nanomonde