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Iseul Turan : «Les Femen sont méprisées et exploitées par leurs donneurs d’ordres qui les maintiennent dans une situation extrêmement précaire»

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Nouvelles de France a rencontré Iseul Turan, une charmante jeune femme blonde qui a infiltré les Femen pendant plusieurs semaines afin d’en apprendre davantage sur le groupe « sextrémiste » et son fonctionnement.

Iseul, qu’est-ce qui vous a poussé à rejoindre les Femen ? 
J’ai d’abord eu l’idée de lancer une réflexion sur la question féminine, j’étais indignée par la teneur des magazines à destination des très jeunes filles, où se répand une pornographie ordinaire à toutes les pages, où des pratiques sexuelles marginales sont promues comme autant de normes auxquelles les jeunes filles doivent se soumettre, sans quoi elles s’exposeraient à être marginalisées… J’ai trouvé dans la vie quotidienne de nombreux motifs d’interroger la place de la femme, comme la parité par exemple. J’ai constaté que la parité mettait les femmes dans la situation d’une minorité protégée, alors qu’elles représente la moitié d la communauté humaine ! Cet état de choses réduit considérablement les mérites des femmes qui sont douées, créant des situations humiliantes pour les femmes qui sont toujours soupçonnées d’être là soit parce qu’elles seraient la maîtresse, la filles, la femme de quelqu’un, soit parce qu’elles auraient été favorisées par un système de quotas. Ou bien encore la question de la justice salariale. À travail égal, salaire égal. Ce n’est pas une question d’égalité, comme on le dit souvent, mais de justice. Enfin, la lutte contre les violences faites aux femmes, ou bien encore la lutte contre le proxénétisme et les réseaux maffieux. 

Avez-vous eu peur, à un moment, d’être repérée ? Peur tout court ? 
Oui, j’ai redouté d’être repérée, même si cela aurait été très difficile au vu de la préparation de mon infiltration. Mais un rien aurait pu me trahir, et là, j’aurais été exposée. Parce qu’autant les Femen ont été plutôt amicales avec moi, autant elles auraient été pu être très virulentes si elles avaient su que je n’étais pas celle qu’elles pensaient. Elles sont emplies de ressentiment contre eux et celles qu’elles considèrent comme des ennemis, et ils se comptent par millions ! Tous ceux qui croient en quelque chose, celles qu’elles considèrent comme « soumises» auxquels on peut ajouter une pincée de dictateurs et de maquereaux… 

J’ai surtout eu très peur samedi dernier, lors du déploiement de forces de l’ordre considérable et totalement disproportionné destiné à empêcher la protestation pacifique des Antigones devant leur repaire, le Lavoir moderne parisien – qui, précisons-le, est subventionné par la Mairie de Paris. Alors qu’après leur profanations et provocations diverses, elles n’ont jamais eu à subir ne serait-ce qu’une heure de garde à vue pour l’ensemble de leurs actions, y compris contre un chef d’État étranger – le président de Tunisie, nous avons été menacées d’arrestations immédiates. J’ai été extrêmement choquée, jusqu’à en éprouver un malaise physique. 

Pendant votre infiltration, avez-vous eu des motifs d’étonnements ? 
Beaucoup de choses m’ont étonnée, en effet. Une des choses les plus surprenante aura été de découvrir que les Femen n’ont pas du tout l’intention de monter un mouvement feministe. Si c’était le cas, elles répondraient aux sollicitations, aux offres de services qui leur sont faites. La vérité, c’est que Femen fonctionne comme une agence de communication qui tourne avec quelques permanentes – entre 6 et 10, selon les besoins. Le reste des filles sont traitées comme un vivier de recrutement pour renouveler l’équipe ou pour relayer les actions sur les réseaux sociaux, la direction mixte du mouvement – les deux Ukrainiennes Inna et Oksana et les trois Françaises considèrent leurs soutiens comme de la chaire à canon. La seconde aura été de découvrir les conditions déplorables dans lesquelles elles vivent, dans un endroit insalubre, mal éclairé, mal isolé, sans un sous, contrairement à l’opinion assez répandue selon laquelle elles rouleraient sur l’or. Ce n’est pas vrai. Elles sont elles même méprisées et exploitées par leurs donneurs d’ordres qui les maintiennent dans une situation extrêmement précaire. J’ai eu d’autres motifs d’étonnement mais, ce qui m’a le plus surprise et beaucoup déçue, c’est le vide sidéral sur le plan des idées, leur absence totale de formation sur le plan intellectuel et le niveau abyssal du débat. J’ai organisé pour elles un débat sur la théorie du gender – à laquelle les Ukrainiennes sont d’ailleurs opposées comme à une théorie bourgeoise selon des critères marxistes. Cela faisait six mois qu’aucun débat n’avait été organisé. Le résultat aura été dérisoire : si l’une ou l’autre des filles est venue échanger quelques mots à l’issue de mon exposé, je ne peux pas dire que ça a suscité le moindre débat, alors même qu’à ce sujet, il y a une vraie césure interne. Les Françaises du groupe, quant à elles, sont favorables ou très favorables au gender, à l’exception de l’une d’elles qui considère le gender comme trop « identitaire » et qui a d’ailleurs écrit un livre contre la théorie du « genre ». Leur cruel manque de substance est masqué par une unité d’action qui est savamment entretenue par les talents de leader d’Inna et l’activisme spectaculaire – au sens de Debord – de Femen. 

« Lorsque le nom de Caroline Fourest a été évoqué devant moi, il a suscité des sourires amusés de la part des filles. Je crois qu’elles la considèrent comme une idiote utile, au sens de Lénine. » 

En avez-vous appris davantage sur le financement des Femen ? 
Je n’ai rien pu apprendre sur place. Mais mon travail d’enquête m’a mise sur la piste… Je ne peux rien vous dire pour l’instant qui ne soit pas une simple rumeur ! 

Si j’ai bien compris, leur rapport avec les forces de l’ordre est un petit peu particulier… 
On peut dire que les Femen utilisent les forces de l’ordre comme des co-producteurs de leurs actions, afin de se donner le rôle gratifiant de victimes de la répression, la réalité est bien différente. Elles jouissent d’une scandaleuse immunité, cela ne peut pas être ainsi sans la bienveillance coupable du ministre de l’Intérieur Manuel Valls. 

À quoi ressemble le féminisme des Femen ? Est-il similaire au féminisme révolutionnaire des Françaises ? 
Le féminisme des Femen est purement nominal, elles se moquent des questions qui occupent habituellement les féministes, surtout françaises : misogynie du quotidien, violences domestiques, égalité des salaires, allaitement ou non, parité, etc. 

Femen contribue d’ailleurs allègrement à ringardiser le féminisme tel que nous l’avons connu avec leur « féminisme pop » et leur « sextrémisme », qui consiste essentiellement à prétendre combattre le patriarcat en adoptant tous les codes de la domination spectaculaire et de l’industrie publicitaire : en un mot lutter contre l’oppression des femmes en adoptant le point de vue du violeur : « Déshabille-toi ! » 

Femen a mauvaise presse auprès des autres groupes avec lesquels elles ont peu ou pas de contacts, de leur propre aveu. D’abord parce qu’elles ont beaucoup de mépris, ensuite parce qu’elles les trouvent ennuyeuses, intellectualistes et pas très sexy… 

Après la sidération et un soutien mitigé et silencieux lorsqu’elles s’en sont pris aux traditionalistes de Civitas et plus largement aux catholiques lors de leur profanationà Notre-Dame, elles ont constaté une nette dégradation de leur cote auprès des médias et des féministes organisées après la crémation du drapeau du prophète de l’islam devant la grande mosquée de Paris. En adoptant une posture paternaliste à l’égard des femmes musulmanes, en prétendant à un féminisme mondial transcendant les situations concrètes et contrastées de chaque pays, en voulant imposer le modèle « d’émancipation » de la femme occidentale comme référent unique, elles ont aussi soulevé des résistances dans les milieux féministes inclusifs. Le féminisme marqué par l’expérience des quartiers populaires comptant un important contingent de populations issues de la décolonisation et refusant de se voir enrégimenter dans la désignation des femmes extra européennes comme un ennemi intérieur, les accuse d’impérialisme et de racisme. On voit que le féminisme est très morcelé et qu’il faut en parler au pluriel, au risque de faire des simplifications dommageables à l’intelligence de la situation actuelle. 

Pouvez-nous en dire davantage sur leur relation avec Caroline Fourest ? 
Je parlerai d’un mariage de raison. Lorsque le nom de Caroline Fourest a été évoqué devant moi, il a suscité des sourires amusés de la part des filles. Je crois qu’elles la considèrent comme une idiote utile, au sens de Lénine. De même, Caroline Fourest a vu en Femen une belle occasion de se faire mousser, en particulier lors de la journée de la femme, qui a donné lieu cette année à une opération de promotion de Femen, avec le film « Nos sein sont des armes » sur France Télévisions. Elles n’ont pas grand chose en commun. Elles s’instrumentalisent mutuellement, mais ce serait une erreur de voir dans leur relation une cohérence, c’est plutôt la rencontre de deux opportunismes. Freud disait à peu près ceci : « L’amour, c’est la rencontre de deux névroses ». En l’espèce, on peut dire qu’il s’agit de la rencontre de deux névroses incompatibles… 

Pourquoi avoir rejoint Les Antigones ? 
Les Antigones existent depuis trois mois et j’y pense depuis février dernier. Les Antigones ont commencé avant que je n’infiltre les Femen. Étant donné les principes directeurs des Antigones, c’est là qu’est ma place, cela me semble tout naturel. La défense et l’approfondissement du sens du féminin ont été ravivés par toute la querelle actuelle sur la complémentarité homme-femme et le refus de la théorie du gender. On comprend bien que toutes les questions sont liées – le travail, la justice, la place de la femme dans la sphère publique, etc. Les Antigones se proposent de les aborder en cohérence, en cherchant des réponses dans le modèle anthropologique classique, loin des expérimentations hasardeuses des apprentis sorciers du Droit souverain et de la toute puissance prométhéenne de la technique telle qu’annalisée par Heiddegger

C’est un vif succès, puisque chaque jour de femmes nous rejoignent et commencent à s’organiser localement pour monter des antennes des Antigones partout en France. Vous n’avez pas terminé d’entendre parler de nous !

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