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Channel: ORAGES D'ACIER
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Quand l'outrage et la rébellion sont deux méthodes appliquées "trop facilement" pour mettre un homme en garde à vue

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L'arrestation ou la conduite au poste sans motif valable peuvent être fâcheux. Pour cela, les forces de l'ordre ont leur botte secrète : l'outrage et la rébellion.
     Selon l'article 433-5 du code pénal, l'outrage correspond au fait de manifester, par tout fait ou geste, une attitude attentatoire "à la dignité ou au respect d'une personne dépositaire de l'autorité publique", tandis que la rébellion se définit selon l'article 433-6 par le "fait d'opposer une résistance violente à une personne dépositaire de l'autorité publique [...] agissant dans l'exercice de ses fonctions".
     Dans bien des cas, le simple fait de tenter d'expliquer à un policier qu'un contrôle n'apparaît pas justifié vous place aux yeux de l'intéressé, pour peu qu'il ait le sens du dialogue un peu limité, en situation d'outrage. Vu qu'il rédigera le procès verbal, sa parole sera plus difficilement contestable et vous vous retrouverez au moins placé en garde à vue, non pour les motifs du contrôle mais pour vous être plaint de ce qu'il était abusif...
     Une illustration, rapportée par France-Info au mois de novembre 2009. Un soir, à Versailles, un homme qui rentre chez lui traverse en dehors du passage piétons. Il est contrôlé par une patrouille de police qui se trouvait en faction au coin de la rue. Le ton monte, la police vérifie son identité. Un témoin intrigué intervient, il est à son tour contrôlé. Les deux hommes rejoignent chacun leur domicile.
     Le soir même, les policiers se présentent chez le premier pour lui remettre une convocation au commissariat. L'intéressé s'indigne : "Nous sommes dans un État totalitaire !"Il est aussitôt menotté, emmené au commissariat et placé en garde à vue pendant dix-huit heures pour "outrage". Le témoin sera interpelé le lendemain par les policiers.
     Un journaliste a rapporté la scène, qui se passe de commentaires : "Il se trouve alors dans la pharmacie où travaille sa compagne. Alors que les forces de police veulent l'emmener au poste, il se débat, est jeté à terre où il demeure inconscient. Les pompiers arrivent, l'évacuent vers un hôpital, puis il se retrouve à son tour en garde à vue, tout comme sa compagne, la pharmacienne P.L., pourtant simple témoin."

Les procédures d'outrage et de rébellion permettent ni plus ni moins aux forces de l'ordre de créer de toutes pièces la situation infractionnelle qu'elles se sont donné pour devoir de faire cesser.
     Autre exemple : au mois de juin 2008, Y. occupe avec trois amis, tous mineurs, une table d'un restaurant des Champs-Élysées. Ils n'ont consommé qu'un soda. Le responsable, qui éprouve quelques difficultés à faire libérer la table, appelle la police. Douze agents interviennent. Sans autres formalités, ils tutoient les jeunes gens, les plaquent au sol et les insultent. Les quatre amis, qui protestent, seront embarqués pour outrage et rébellion, ce qui n'a rien à voir avec les faits ayant donné lieu au déplacement des policiers. Ils passeront, bien qu'âgés de 15 à 17 ans, plus de quinze heures en garde à vue.
     La juge Emmanuelle Perreux a parfaitement résumé le dévoiement des chefs d'outrage ou de rébellion : "Nous n'avons pas de statistiques nationales, mais j'avais fait une étude auprès du parquet de Bordeaux il y a trois ans, dans laquelle je constatais déjà une hausse de 70% du nombre de cas soumis au tribunal de grande instance de Bordeaux. Depuis, la progression est flagrante."

Le livre noir de la garde à vue, Maître Patrick Klugman

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