À Paris, ils pèsent un tiers du «noyau dur» des mis en cause par la police. L'ONDRP détaille même leur proportion par nationalités et par types de délits.
L'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP) s'attaque à un sujet délicat : la part des étrangers dans les «multimises en cause pour crimes et délits». En clair : ce qu'ils pèsent dans le «noyau dur» de la délinquance constatée par les forces de police. Cette étude scientifique, qui puise dans le fichier des antécédents judiciaires (STIC) du ministère de l'Intérieur, passe au crible un large échantillon d'environ 1500 personnes mises en cause pour cinq infractions ou plus ayant eu lieu en 2009 et 2010 à Paris ou dans sa proche couronne (Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne). Elle a déjà révélé, d'une manière générale la part prépondérante des mineurs (53,4%) dans les infractions commises par les délinquants suractifs.
Mais, concernant plus spécifiquement les étrangers, les résultats sont tout aussi instructifs. On y découvre qu'ils pèsent un tiers des multimis en cause dans l'agglomération parisienne. Et encore ces chiffres ne sont-ils pas rapportés à ce que représente dans la population globale du Grand Paris chaque communauté, Français, d'un côté, forcément les plus nombreux, et étrangers, de l'autre. Ce qui aurait abouti à des écarts encore plus importants. Bien entendu, l'étude ne concerne pas les Français d'origine étrangère.
Premier enseignement donc : «Les étrangers multimis en cause présentent une part d'atteintes aux biens supérieure à celle des Français (76,4%, à comparer à 58,6%)», écrit l'auteur principal de ce travail de fourmi, Étienne Perron-Bailly, chargé d'études à l'ONDRP. En clair : si l'on s'en tient aux arrestations réalisées par la police et la gendarmerie, les étrangers sont davantage impliqués dans les vols ou les cambriolages notamment. En revanche, dans l'hexagone, Français et étrangers multimis en cause sont au coude-à-coude en matière d'escroqueries et d'infractions financières. Les Français sont plus représentés dans toutes les violences qui n'ont pas pour objet l'acquisition d'un bien ou d'une somme d'argent.
Deuxième enseignement : les Français sont davantage mis en cause pour les infractions révélées par l'action des services, comme les affaires de drogue, de recel, de port d'armes prohibées. Ce qui contribue à relativiser les accusations récurrentes de «chasse au faciès» de la part des forces de l'ordre.
Mais surtout, l'étude de l'ONDRP s'intéresse au profil des mis en cause par nationalités (voir notre infographie). Et le portrait se précise. Chez les étrangers mis en cause au moins cinq fois par les agents (450), ceux de nationalité roumaine représentent plus de la moitié de l'effectif (231). Parmi ces derniers, 89,6% sont mineurs: 37,7% de garçons et 51,9% de filles.
C'est dire si certaines catégories donnent du fil à retordre à la police. «Les femmes mineures multimises en cause (131 au total) sont essentiellement originaires de Roumanie ou d'Europe balkanique (120 femmes mineures). Les autres nationalités présentent des nombres de filles mineures très faibles», euphémisent les statisticiens de l'observatoire dirigé par le criminologue Christophe Soullez. Et pour cause : dans leurs tableaux, on trouve un seul cas d'une étrangère mineure d'une autre nationalité.
Quel que soit l'âge des étrangers plusieurs fois mis en cause, sur les 450 cas isolés par les statisticiens comme représentatifs, selon eux, après les Roumains et les ressortissants des Balkans viennent les étrangers du Maghreb (105 cas), d'Afrique (63 cas) et de Chine (12 cas). Les autres nationalités représentent 39 cas.
Les experts de l'ONDRP précisent: «Les multimis en cause de Roumanie ou d'Europe balkanique présentent un profil très porté sur les atteintes aux biens (92,7% des multimis en cause)». Parmi cette catégorie, les hommes majeurs ont été mis en cause en moyenne plus de onze fois. Ce qui laisse à penser qu'ils influent fortement sur la statistique de la multirécidive (plusieurs fois le même délit) ou de la multiréitération (des délits successifs de natures différentes) dans l'agglomération parisienne.
Pour les autres nationalités, l'ONDRP révèle que «la quasi-totalité des multimis en cause du Maghreb sont des hommes (24,8% de mineurs et 73,3% de majeurs)» et que «le nombre moyen d'infractions principales par mis en cause» les concernant est de huit environ.
Par ailleurs, «les multimis en cause d'Afrique hors Maghreb sont en grande partie des hommes, principalement majeurs (65,1%)», décryptent les scientifiques.
À les lire, «les hommes mineurs d'Afrique hors Maghreb sont assez souvent mis en cause pour atteintes volontaires à l'intégrité physique», c'est-à-dire de faits de violence.
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