Une mosquée turque dans l’état allemand de Rhénanie du Nord-Westphalie a commencé à lancer des appels publics à la prière depuis un haut-parleur installé sur le toit de l’édifice.
Cette mosquée fait partie du nombre croissant d’institutions islamiques en Allemagne (et ailleurs en Europe de l’ouest) appelant publiquement les musulmans à la prière – cinq fois par jour, sept jours par semaine – aux cris d’Allah Akbar («Allah est Grand»). Des observateurs croient qu’un précédent a été établi et que la plupart des 3.000 autres mosquées d’Allemagne commenceront à installer des haut-parleurs.
Les appels à la prière sonores (adhan en arabe) peuvent être entendus à de grandes distances quand ils sont amplifiés par des haut-parleurs électriques ; les sons et les images de certaines villes allemandes commencent d’ailleurs à évoquer le Moyen-Orient islamique.
Le dernier «évènement muezzin» concerne la mosquée Faith Camii de Wipperfürth, une ville industrielle située à 40 kilomètres au nord-est de Cologne qui a commencé le 21 juin à appeler publiquement les musulmans à la prière lors d’une «cérémonie d’intronisation du muezzin» formelle à laquelle ont assisté des dignitaires locaux et étrangers, y compris le consul turc, Mustafa Kemal Basa.
La mosquée Fatih Camii – gérée par l’Union Turco-Islamique pour les Affaires islamiques, une branche du gouvernement turc qui contrôle plus de 900 mosquées en Allemagne – a reçu l’autorisation municipale permettant au muezzin d’appeler les musulmans à la mosquée pour la prière cinq fois par jour après que le maire Michael von Rekowski a dit qu’il voulait montrer au monde que Wipperfürth était «fière d’être une communauté interculturelle et interreligieuse».
À la demande du maire, les dirigeants de la mosquée de Wipperfürth ont rencontré les représentants des églises protestantes et catholiques de la ville afin «d’intégrer» l’horaire des appels à la prière musulmane dans l’horaire traditionnel des cloches des églises. Bien que de nombreux résidents non musulmans sont opposés à l’appel du muezzin, le clergé local s’est dit satisfait de la «coexistence pacifique des religions et cultures» dans la ville. La mosquée de Wipperfürth est l’une des nombreuses mosquées d’Allemagne à avoir obtenu l’autorisation municipale pour les appels à la prière.
La Mosquée Centrale gérée par des turcs dans la ville de Rendsburg dans le nord de l’Allemagne, à 100 kilomètres au nord de Hambourg, appelle les musulmans à la prière depuis 2010, année où le maire socio-démocrate Andreas Breitner a autorisé le muezzin à lancer des appels à la prière dans trois haut-parleurs situés en haut des minarets de 26 mètres ornant chaque côté de la mosquée. Les appels à la prière sont permis entre 6 heures et 22 heures.
Le journal allemand Die Zeit a rapporté que Rendsburg était engagée dans une «guerre sainte» quand un groupe de citoyens locaux a rassemblé près de 1000 signatures pour s’opposer au muezzin. Le groupe «Pas d’appels publics à la prière» faisait valoir que la construction de la mosquée suffisait largement à garantir aux musulmans leur droit constitutionnel à la liberté d’expression, et que les demandes subséquentes d’un muezzin appelant les fidèles à la prière étaient excessives. Le groupe a également fait valoir que le coran ne fait aucune mention d’un muezzin, en sorte que cette fonction est superflue.
Selon une femme interrogée par le journal, il n’y avait aucune mention d’un muezzin quand la mosquée a été inaugurée en octobre 2009. « Puis ils ont proposé qu’un muezzin appelle les fidèles à la prière du vendredi. Ce fut ensuite trois fois par jour, et maintenant c’est cinq fois par jour. L’appel à la prière dure trois minutes, et c’est trop, surtout qu’on nous crie qu’Allah est le plus grand», a-t-elle dit. (L’adhan, qui se compose de 15 versets, dont certaines sont répétés plusieurs fois, dure environ trois minutes)
Les opposants au muezzin ont également souligné le fait que la mosquée adhère à Milli Görüs, un mouvement politico-religieux islamiste néo-ottoman appelant à «l’établissement d’un empire turc national-religieux». Bien que Milli Görüs ait été surveillé par les services secrets allemands pour activités anticonstitutionnelles, le groupe opère librement dans toute l’Allemagne.
Malgré l’opposition de citoyens aux appels publics à la prière, le maire Breitner a dit qu’il avait les mains liées puisqu’aucune loi ne permet d’empêcher la plus grande mosquée de l’Etat allemand du Schleswig-Holstein de le faire. Selon Breitner, l’article 4 de la Constitution allemande consacre la liberté de religion, et «j’estime que je n’ai aucune marge de manœuvre».
Dans la ville voisine de Neumünster, la mosquée turque Fatih lance des appels à la prière trois fois par jour depuis 15 ans. Selon l’imam local, Celebi Kilicikesen, un Turc qui ne parle presque pas l’allemand, «il arrive parfois que des enfants espiègles montent le volume des haut-parleurs et que les voisins se plaignent. Sinon, il n’y a jamais eu de problème».
Dans l’état de Rhénanie du Nord-Westphalie, la mosquée turque Kuba Camii à Eschweiler, une ville située le long de la frontière germano-belgo-néerlandaise à environ 50 kilomètres à l’ouest de Cologne, a obtenu en décembre 2012 l’autorisation municipale pour l’appel public à la prière. Le premier appel a eu lieu en grande pompe le vendredi 11 janvier 2013. Une myriade de dignitaires, y compris le consul turc, Mustafa Kemal Basa, et l’attaché turc, Tayfun Keltek, ont assisté à ce qui a été décrit comme un «évènement historique».
L’imam turc de la mosquée, Bahri Ciftci, a déclaré: «Puisse l’appel public à la prière être le symbole d’une coexistence tolérante, interculturelle et interreligieuse». Lors de la cérémonie, le maire d’Eschweiler, Rudi Bertram, a déclaré: «La tolérance doit être pratiquée sur une base quotidienne. Nous sommes tous responsables de veiller à la bonne coexistence».
Le chef de l’Union turco-islamiste pour les affaires religieuses, Izzet Er, a participé à l’évènement et affirmé que Mahomet avait lui-même été un modèle de coopération religieuse. Il a ajouté : «J’ai le désir et l’espoir de contribuer à la coexistence pacifique de tous les citoyens d’Eschweiler. Les valeurs éthiques sont universelles et valables pour tous ». Sans trop de surprise, Izzet Er a omis de mentionner que le gouvernement turc est l’un des plus grands persécuteurs de chrétiens (et de journalistes) du Moyen-Orient moderne.
Selon un nouveau livre intitulé «Persecuted : The Global Assault on Christians» (Persécutés : l’assaut mondial contre les chrétiens), rédigé par trois chercheurs de l’Institut Hudson, «dans la Turquie d’aujourd’hui, les communautés chrétiennes font face à deux menaces liées : elles sont opprimées par des restrictions gouvernementales globales sur la gouvernance interne, l’éducation, les lieux de culte et les droits de propriété plus larges, et par le déni de statut juridique. En pratique, elles n’ont pas le droit de gérer des séminaires et de détenir directement des propriétés. Le gouvernement surveille et tente de contrôler toute activité chrétienne à travers sa Direction des fondations religieuses.»
Le livre poursuit: «En second lieu, …il y a une forte hostilité envers les minorités religieuses en Turquie. Ce sectarisme est renforcé par l’attitude officielle de suspicion envers les chrétiens. Il est même difficile d’avoir un débat national honnête sur la situation des chrétiens en Turquie; ceux qui essaient … sont susceptibles d’être inculpés pour insulte à l’identité turque».
En fait, la section du livre sur la persécution des chrétiens en Turquie occupe plus de pages que la section sur la persécution des chrétiens en Iran et en Arabie Saoudite. Le livre conclut : «La Turquie moderne est la patrie de descendants de communautés chrétiennes menacées d’extinction».
Également en Rhénanie du Nord-Westphalie, une mosquée de Chorweiler dans la ville de Cologne appelle régulièrement les musulmans à la prière dès 6 heures AM, comme le montre cette vidéo sur YouTube. Dans la ville de Krefeld, les élus locaux veulent s’assurer de l’égalité juridique entre les appels à la prière musulmane et le son des clochers des églises chrétiennes dans la ville.
Ailleurs en Rhénanie du Nord-Westphalie, la mosquée turque Selimiye Camii d’Eving, un quartier de Dortmund, la 8e plus grande ville d’Allemagne, a promis en 2009 de ne pas demander l’autorisation de faire des appels publics à la prière au cours des six prochaines années, soit jusqu’en 2014.
C’est avec un sentiment d’appréhension que Friedrich Stiller, un pasteur protestant d’Eving, a dit que beaucoup de gens oublient que les musulmans voient l’appel public à la prière comme un droit. Il a ajouté que le minaret est un symbole : «Il représente l’arrivée de musulmans dans une société».
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