Les dirigeants des grands réseaux bancaires ont apprécié d’être enfin reçus à l'Élysée. Ils ont souligné que les nouvelles contraintes qui pèsent sur les banques limitent leur capacité à financer l’économie.
Il aura fallu plus d’un an pour que François Hollande rencontre enfin, vendredi après-midi, les patrons du secteur bancaire français. Sans doute parce que le président de la République voulait d’abord encadrer cette « finance sans nom et sans visage » dont il avait fait son principal ennemi durant sa campagne électorale. La loi de séparation et de régulation des activités bancaires définitivement adoptée par le Parlement depuis jeudi dernier, la rencontre le lendemain même entre François Hollande et les membres du comité exécutif de la Fédération bancaire française (FBF) marque une nouvelle étape plus coopérative. Cet entretien d’une heure à l’Elysée « s’est très bien passé, nos échanges ont été constructifs », a confirmé l’un d’eux aux « Échos ». Et d’ajouter sur le ton de la plaisanterie : « François Hollande va bientôt devenir un professionnel de la chose bancaire ! »
D’ailleurs, alors que Bercy a annoncé, dans les heures qui ont suivi la rencontre, la décision de rendre aux banques 30 milliards d’euros de la collecte d’épargne réglementée centralisée à la Caisse des Dépôts , l’exécutif pourrait aller plus loin. Selon nos informations, un bilan de cette mesure est prévu à l’automne. Si la production de crédits aux PME a repris d’ici là un rythme dynamique, les établissements bancaires pourraient obtenir 20 milliards d’euros supplémentaires d’épargne réglementée.
Le ton est donné. Après avoir manié le bâton, le président de la République a désormais hâte de mettre des noms et des visages sur un secteur dont il a absolument besoin pour conforter la reprise économique. Ces noms sont ceux des dirigeants des 6 grands réseaux bancaires français : Jean-Paul Chifflet, directeur général du Crédit Agricole et président de la FBF, Jean-Laurent Bonnafé, directeur général de BNP Paribas, Michel Lucas, président de Crédit Mutuel-CIC, François Pérol, président du directoire de BPCE, Séverin Cabannes, directeur général délégué de la Société Générale, qui remplaçait son PDG, Frédéric Oudéa, et Philippe Wahl, président du directoire de La Banque Postale. François Hollande les a tous conviés pour s’assurer que leurs établissements sont bien prêts à financer l’économie à hauteur de ses besoins.
Des marges de manœuvres limitées
Le sont-ils ? Officiellement oui. Ils ont d’ailleurs souligné que leurs encours de crédit n’avaient cessé de progresser. Mais cette rencontre était pour les banquiers l’occasion de reprendre la main sur leur destin. Ils estiment en effet que les réformes prudentielles, réglementaires et fiscales variées, dont ils ont fait les frais ces derniers mois, limitent considérablement leurs marges de manœuvre. Selon eux, il faut mettre un terme à ce « bank bashing » afin que « les banques puissent faire ce qu’elles ont envie de faire et qui est leur métier : l’économie. Cela est vital pour notre pays, pour l’emploi et pour la croissance », a insisté Jean-Paul Chifflet à sa sortie de l’entretien.
Jusqu’ici cette mise en garde ne portait pas parce que les besoins de financement des entreprises étaient moindres du fait de l’environnement récessif. Le mois dernier, les encours de crédits aux PME stagnaient voire diminuaient pour les entreprises de taille intermédiaire (– 1,9%). Mais si leur appétit d’investissements retrouve des couleurs avec la reprise, les banques assurent que leurs contraintes seront trop fortes pour qu’elles puissent honorer toutes les demandes de crédit. Or François Hollande veut non seulement croire à ce scénario mais il veut aussi le faire vivre. Pour cela, il est prêt à tendre la main aux banques.
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