Le 25 septembre, les Rouges donnent l'assaut suprême. Il est quatre heures du matin quand ils font sauter la dernière des mines, si péniblement posées par les hommes des Asturies. La terre semble s'ouvrir, la ville s'écrouler d'un seul coup, dans un fracas épouvantable. Des murs entiers volent à travers l'espace et retombent au loin ; le châssis d'un camion automobile, arrêté au pied de l'Alcazar, est projeté dans la cour du couvent de San Domingo, de l'autre côté de Tolède. L'entonnoir ouvert par l'explosion a cent mètres de diamètre, soixante-dix de profondeur. Et de la place Zocodover, où ils étaient sous pression, les tanks s'engagent, à travers le sol défoncé, parmi les crevasses béantes. Mais voici que, du milieu des décombres, resurgissent ces insurgés diaboliques qu'aucune explosion ne saurait atteindre. A coups de grenades, ils attaquent les assaillants et les repoussent une fois encore.
C'est la fin... La délivrance n'est plus qu'une question d'instants. Au cours de la journée, une sorte de trêve commence, au reste, à s'établir. Deux gardes d'assaut ont, une dernière fois, tenté de s'approcher de l'Alcazar avec des bombes incendiaires. L'un d'eux est tué... Son camarade supplie le Cadet de garde de lui laisser emporter le corps de son compagnon - ce qu'on l'autorise à faire, dès qu'il a mis bas les armes. Dans la nuit, à la faveur d'un violent orage, des phalangistes et des Cadets quittent la forteresse et pénètrent jusqu'aux faubourgs où ils s'emparent d'une ample provision de vivres ; ils regagnent leurs souterrains, sans avoir été une seule fois alertés.
A Madrid, le gouvernement se désintéresse de l'Alcazar (Largo Caballero l'a dit à mots couverts au général Asensio). On ne songe plus qu'à dégarnir la ville en hâte et à retirer les troupes, pour les envoyer au plus vite en direction de Torijos et de Talavera, où elles vont se heurter aux soldats du colonel Casteljon qui coupent déjà presque toutes les routes et commencent à cerner Tolède.
Le 26 septembre, à 6 heures du soir, l'avant-garde de Franco, la colonne Yague, devenue la colonne Varela, arrive aux portes de la ville. A moins d'un kilomètre des remparts, une autre colonne vient de prendre la formation de combat. Une liaison par signaux est immédiatement établie avec l'Alcazar, dont commence le soixante-huitième jour de siège.
Henri Massis et Robert Brasillach, Les Cadets de l'Alcazar