(...) Car la France était gouvernée par une oligarchie de "deux cents familles". Aux entrées de métro, les vendeurs criaient :
- Demandez la liste officielle et complète des deux cents familles.
Nul ne s'étonnait de cette annonce énorme et bouffonne. Les bourgeois blêmissaient, pensaient qu'ils seraient sauvés tantôt par le PSF et tantôt par les radicaux, donnaient aux quêteurs rouges, se laissaient arrêter sur les routes, et avaient une belle frousse. Rares étaient ceux qui faisaient le coup de poing avec les grévistes : il y en avait pourtant, et à qui personne n'osait toucher. D'autres étaient plus mûrs pour les révolutions qui, il faut bien le dire, ne sont pas immérités pour tout le monde. Dans une entreprise que je connais, on reçut avis que les Rouges viendraient "attaquer" un samedi après-midi. C'était l'été, le patron était sur son yacht. Il téléphona qu'il accourait, et que quelques employés fussent prêts à défendre le capitalisme. Des camarades vinrent donc, avec un petit arsenal, tout l'après-midi. Point d'assaillants. Point de patron non plus. Le lundi suivant, il apparut pourtant, et, doucement railleur, il déclara :
- Alors vous avez été en état d'alerte pieuse, samedi ?
Notre avant-guerre, Robert Brasillach