C’est en Grèce que la crise de la zone euro avait démarré en fanfare. Et si le pays ne fait plus guère parler de lui, ce n’est pas parce qu’il serait enfin sur la voie du redressement. C’est au contraire parce qu’il continue de s’enfoncer dans la misère et le désespoir.
Parmi les pays en crise, la Grèce est le pays des superlatifs : selon la Commission européenne, le pouvoir d’achat des Hellènes a diminué de 23% depuis 2008 (contre -2% pour les Français). Le chômage touche 26% de la population active et même 58% chez les moins de 25 ans. Plus du double des taux hexagonaux. Un commerce sur trois a fermé dans Athènes depuis 2009 et quasiment un emploi sur cinq a disparu depuis 2008.
L’austérité budgétaire s’est traduite par des coupes drastiques dans les dépenses publiques de santé, qui ont baissé de 28% en volume entre 2008 et 2011, alors qu’elles augmentaient de 8% en France : le système de santé est exsangue, les hôpitaux manquent de personnel et de médicaments. Au bout d’un an, les chômeurs ne sont plus couverts par l’assurance maladie. Et les dépenses d’éducation ont elles aussi reculé de 1% en volume entre 2008 et 2011, pas de quoi préparer un meilleur avenir pour la jeunesse grecque.
Une dette à 176% du PIB
Parallèlement, le taux de TVA a été porté à 23% en 2011 et des efforts réels ont été accomplis pour lutter contre la fraude fiscale, massive jusque-là chez les non-salariés. Les Grecs demandent désormais partout des factures pour justifier leurs dépenses aux yeux du fisc. Pourtant, du fait de la baisse de l’activité, les recettes de l’Etat (80 milliards d’euros en 2008) devraient se limiter à 65 milliards d’euros cette année, selon la Commission européenne. Pas étonnant, dans ces conditions, que la dette publique continue de gonfler, atteignant cette année 176% du PIB, contre 113% en 2008 (après correction des manipulations comptables). Un niveau insupportable malgré l’allégement de 107 milliards d’euros auquel les Européens ont procédé en mars 2012. Dans ces conditions, il n’est guère surprenant que les forces politiques traditionnelles soient complètement discréditées, tandis que les tentations autoritaires de l’extrême droite recueillent un écho de plus en plus significatif.
Le tour d’Europe de la crise sociale Alternatives économiques n°323