Le match particulier de ce jour là n'incitait pas Flavio à l'achat d'un billet. Dans certaines occasions, on entre en poussant, littéralement, autrement il n'y a pas de plaisir.
C'était un jeu pratiqué dès qu'on le pouvait, une démonstration de courage personnel et également un défi à la parfaite organisation économique qui avait endigué un sport ancien et populaire, le transformant en une machine à moudre de l'argent. Ils avaient placé tellement de mesures de sécurité, de tourniquets, de stadiers, de carabiniers et de CRS en tenue anti-émeute, que le fait d'aller au stade devenait une action de guerre. Flavio n'avait jamais vu de zone de guerre, mais probablement il y existait moins de précautions et de contrôles obsessionnels que dans un match de la Coupe.
Dès qu'il s'est approché du stade, il avait remarqué en ricanant les fourgons de police, aux grillages soudés sur les fenêtres, qui attendaient, parqués en petits groupes, comme de placides dinosaures herbivores dans un pré. Leur chargement d'hommes en tenue d'intervention s'était déjà positionné à l'intérieur et en dehors du stade, trois mètres après les tourniquets, pour la fouille, particulièrement soigneuse vers les virages, où s'installent les plus excités. Abandonnant le scooter, Flavio avait fait un tour pour localiser les zones de plus grande affluence, où les stadiers étaient davantage distraits à cause de la ruée. Jusqu'à quelques années auparavant, on pouvait encore bondir par dessus les morceaux de grillage les moins surveillés. A présent, on entrait en poussant, et ce n'était pas une métaphore mais une technique, appelée "en portefeuille", imaginée pour se jouer des barrières et des billets électroniques, les nouvelles mesures de sécurité qui auraient dû conjurer la violence dans les stades. En cinquante années pourtant les ultras ont fait moins de morts qu'en un week-end d'autoroute. Le phénomène de ces jeunes qui poussent des coudes pendant les matchs doit être férocement réprimé, au nom du business du foot et des droits télévisés que les canaux satellitaires paient aux sociétés.
Nessun Dolore, Domenico Di Tullio