Charles Maurras tente de dépasser la critique de Drumont et le lyrisme positif de Barrès. Il entend apporter une solution politique. On doit regretter que cet esprit exceptionnel soit venu trop tôt, plus marqué par ce siècle qui agonisait que par celui-ci était entrain de naître. Il n'a pas perçu les grandes voies nouvelles où ses idées auraient pu développer une ampleur créatrice. Ce n'est donc pas la construction théorique d'une monarchie idéale qui intéresse chez lui, mais la pénétration qu'il apporte à découvrir le réel et à détruire les sophismes déréalisants du rationalisme : "Au petit de l'homme, il manque tout. Bien avant de courir, il a besoin d'être tiré par sa mère, lavé, couvert, nourri. Avant que d'être instruit des premiers pas, des premiers mots, il doit être gardé de risques mortels. Le peu qu'il a d'instinct est impuissant à lui procurer les soins nécessaires, il faut qu'il les reçoive, tout ordonnés d'autrui. Il est né. Sa volonté n'est pas née, ni son action proprement dite. Il n'a pas dit Je, et il en est fort loin, qu'un cercle de rapides actions prévenantes s'est dessiné autour de lui. Le petit homme presque inerte, qui périrait s'il affrontait la nature brute, est reçu dans l'enceinte d'une autre nature empressée, clémente et humaine ; il ne vit que parce qu'il est le petit citoyen.
Son existence a commencé par cet afflux de services extérieurs gratuits. Son compte s'ouvre par des libéralités dont il a le profit sans avoir pu les mériter, ni même y aider par une prière. Il n'en a rien pu demander ni désirer, ses besoins ne lui sont pas révélés encore (...) Le groupe auquel il a participé est parfaitement pur de toute égalité : aucun pacte possible, rien qui ressemble à un contrat. Ces accords moraux veulent que l'on soit deux. Le moral de l'un n'existe pas encore."
Profondément imprégné d'héllénisme, il montre que le nationalisme est moins une question sensible qu'une "obligation rationnelle et mathématique".
