L’affaire s’est répandue comme une traînée de poudre dans le monde religieux. Surtout sur la toile, où cette histoire d’un enseignant interdisant à ses élèves de faire le signe de croix à l’entrée d’une cathédrale provoque une vague d’indignation, depuis jeudi.
Les faits dénoncés ne sont pourtant pas à ce stade formellement établis. Une chose est sûre : un professeur d’histoire-géographie du collège public Cité a planifié cette semaine une sortie scolaire à la cathédrale Saint-Just. Il a, dans ce cadre, fixé des règles aux élèves. Ce sont ces instructions qui font débat.
Selon le témoignage attribué à un parent d’élève, largement relayé sur la toile, l’enseignant qui accompagnait, jeudi, les jeunes lors de cette sortie "leur a précisé que si l’un d’entre eux faisait le signe de croix en rentrant dans la cathédrale, il récolterait trois heures de colle".
Le professeur "a confondu laïcité et négation du fait religieux"
Le responsable des Jeunes populaires de l’Aude
Des propos qui ont interpellé Franck Miro. S’il reste prudent et modéré, le responsable des Jeunes populaires de l’Aude estime que les faits, s’ils sont avérés, montrent que le professeur "a confondu laïcité et négation du fait religieux". Le leader des Jeunes UMP souligne, dans un communiqué, que "la laïcité impose la neutralité du service public, mais elle n’est certainement pas la négation du fait religieux dans l’espace public. Si les élèves ne peuvent, en vertu de la loi de 2003, afficher des signes ostentatoires, rien ne leur interdit des signes discrets."
"Des règles de bonne conduite"
L’inspecteur d’académie
L’enseignant est-il resté dans ce cadre ? Au collège de Cité, la communication est réduite au strict minimum. Le principal, M. Bagdadi, renvoie vers le rectorat : "Il faut appeler le cabinet du recteur, c’est lui qui gère cette affaire." Rectorat qui s’est, lui, révélé particulièrement compliqué à joindre hier après-midi. Olivier Millangue, le directeur des services départementaux de l’Éducation nationale, a demandé au chef d’établissement des précisions sur cette affaire. Il faut dire que l’inspecteur d’académie a lui aussi été saisi, via un courrier, par un parent d’élève en colère. "Le principal répond de son enseignant, connu pour être fiable et neutre, souligne Olivier Millangue. D’après les éléments qui m’ont été communiqués, celui-ci avait fixé des règles de bonne conduite à ses élèves avant la visite de la cathédrale. Il leur a dit “on ne grignote pas, on ne se chamaille pas et si on veut faire un signe de croix, on ne le fait pas de façon ostentatoire”."
Derrière le buzz
Selon l’Éducation nationale, il n’y aurait donc pas eu d’interdiction formelle, mais une simple consigne de discrétion adressée à des collégiens sur le point de découvrir un édifice religieux du patrimoine historique de la ville.
Des nuances qui n’ont pas ému, outre mesure, sur la toile où de nombreux sites et internautes pointent déjà un dérapage, voire même un acte antichrétien.
Alors, qui alimente ainsi le buzz depuis deux jours, au point d’alerter les services de l’Éducation nationale ? Au centre de la polémique, on retrouve Novopress. Ce site internet, présenté comme "une agence de presse indépendante", a en réalité été créé par des membres du Bloc identitaire, classés proches de l’extrême droite. C’est ce groupe qui est à l’origine de la diffusion du témoignage d’un parent d’élèves repris par des dizaines de sites internet. Le site web propose même à ses lecteurs mécontents de contacter le collège Cité, en mettant en ligne les coordonnées de l’établissement. Une pression supplémentaire, utilisée par un site puissant.
Novopress fait régulièrement parler de lui
Le 21 septembre dernier, Le Nouvel Observateur avait consacré un article à Novopress. Selon les éléments recueillis à l’époque pas nos confrères, le site est devenu, avec plus d’un million et demi de pages vues par mois, un poids lourd de la “réacosphère”.
Une arme redoutable de diffusion des idéaux nationalistes, très bien référencée par Google, Novopress fait régulièrement parler de lui. Et ce n’est pas la première fois que son équipe s’intéresse à Narbonne, où certains mouvements identitaires comptent des relais. Depuis quelques mois, Novopress a dénoncé la construction d’une stèle dédiée aux rapatriés d’Algérie, ou encore le projet d’option consacré aux “Sorcières et magiciens” dans un établissement catholique de la ville...Source