Quand on aura abattu le dernier calvaire pour ne pas supplicier l’incroyant,
Quand on aura débaptisé Saint-Paul, Bonne-Nouvelle, Filles-du-Calvaire et bien d’autres stations pour leur donner le nom de grincheux laïcs, batteurs de pavé et péripatéticiennes botoxées,
Quand on aura décapité, au parvis des cathédrales, le dernier des martyrs, le plus petit évêque, le saint le plus menu,
Quand on aura chassé du calendrier des postes le tout petit « st » devant tous les prénoms, le « ste » devant les autres, Quand le 15 août ne sera plus que l’anniversaire d’Alain Juppé,
Quand tous les pères Noël païens auront rejoint les crèches semi-païennes et les autres dans les caves du Vatican, interdites partout ailleurs,
Quand les pardons bretons, prohibés, auront lieu de nuit, dans une sardinerie désaffectée,
Quand les Ostensions limousines, prohibées, auront lieu sur Internet,
Quand la fête des Saintes-Maries-de-la-Mer, prohibée, n’ameutera plus un voleur de poules,
Quand les Vierges Noires d’Auvergne ne devront leur maintien qu’au fait qu’elles étaient noires,
Quand les professeurs nommés dans l’enseignement catholique seront tellement faux-témoins, bouffis de mauvaise conscience, persécutant les rares élèves qui allaient à la messe,
Quand l’Angélus ne sonnera plus que dans le sonotone des pensionnaires d’un EHPAD oublié, Quand les religions auront été refoulées dans une sphère tellement privée qu’irrespirable,
Quand tous les signes intérieurs auront rejoint les extérieurs dans l’opprobre général,
Quand tous les anciens scouts, les diplômés d’Universités Catholiques, les bacheliers de Sainte-Gudule, Saint-Erambert, Notre-Dame-du-Pain-d’épices, auront été éliminés des recrutements dans la fonction publique et ailleurs,
Quand les livres d’histoire auront été expurgés de tout ce qui rappelle autre chose que le néant, le ressentiment et l’érotisme métissant,
Quand la dernière cloche se sera tue, le dernier enclos paroissial effondré, l’ultime croix du plus ignoré des cimetières effritée,
Quand enfin la laïcité aura avoué que son combat était hostile et non rassembleur,
Quand l’absence assourdissante de la prière des pauvres régnera sur la France,
Quand la charité ne sera plus qu’un prélèvement obligatoire, la Foi un délit pénalement punissable, l’Espérance une utopie défunte,
Il se trouvera quand même, un homme, une femme, un trisomique, une major de l’X, un métallo, une majorette, un vieillard, un enfançon, un mécréant ou une sainte pour garder allumée la flammèche de la croyance en un Dieu aimant.
Et de cette escarbille, tout pourra un jour renaître.