Il faut confisquer les biens des riches émigrés, boycotter leurs œuvres, ce sont des traîtres à la patrie, un procès s’impose... On croit entendre le discours des sans-culottes contre leurs adversaires politiques, royalistes et tenants de l’Ancien régime au moment de la Révolution française.
1 - Mort aux Gros, aux Riches, aux Émigrés !
Avec force démagogie, Lui-Président, pour se donner un vernis de gauche lors de sa campagne électorale, avait dénoncé le monde de la finance et agité la menace d’un impôt confiscatoire sur les hauts revenus. Que la République française ne puisse désormais payer ses fonctionnaires qu’en s’endettant auprès de cette finance honnie ne lui posait aucun problème pourvu que cette triste réalité n’affleure pas l’esprit de son électorat.
Il n’en fallait pas davantage pour faire oublier sa genèse politique : le delorisme bon teint des énarques carriéristes ayant misé sur la gauche au début des années 1980. Cette petite manipulation lui permit de circonscrire efficacement Mélenchon à une embellie sondagière sans prolongement dans les urnes. Une chose était sûre : les diatribes contre les possédants rencontraient un joli succès dans les meetings.
Mais la boîte de Pandore était entr’ouverte et, confronté à une hausse inexorable du chômage et de son impopularité, Hollande voit croître désormais, parmi ses soutiens de plus en plus déroutés, un sentiment anti-riches qu’il ne contrôle plus. L’affaire Depardieu en est le symptôme évident et l’on aurait finalement tort de ne pas la prendre au sérieux. La haine des "possédants" devient en effet la planche du salut psychologique d’un "peuple de gauche" qui se sent menacé par le monde tel qu’il devient.
Tout a singulièrement commencé. L’octroi par Poutine d’un passeport russe à l’acteur français était un camouflet pour Hollande mais aussi pour tous les partisans de sa recette miracle, faire payer les riches. Malédiction : ces ploutocrates peuvent vraiment s’en aller ! Alors que, dans un premier temps, le Monde, le Nouvel Obs et Libération avaient tenté de minimiser le symbole et n’avaient placé l’affaire du passeport qu’en sujet annexe, sur leurs sites Internet la marée des commentaires montrait à quel point leurs lecteurs, eux, brûlaient d’en découdre : près de 2737 "posts" sur Libération.fr en quelques heures.
Il est intéressant d’écumer ce flot de haine et d’acrimonie. Plusieurs thèmes dominent : il faut confisquer les biens de ces émigrés, boycotter leurs œuvres, ils sont gros et gras, dépravés et alcooliques, ce sont des traîtres à la patrie, un procès s’impose.
Mots pour mots, on retrouve les écrits et éructations des Sans-culottes contre leurs adversaires politiques, d’abord les royalistes et autres tenants de l’Ancien régime puis tous ceux qui ne partageaient pas leurs penchants. Du Monde à Libération, les réactions sont peu ou prou les mêmes : comme en 1793 les "accapareurs", les horribles nantis d’aujourd’hui sont la cause de tous les maux de la France.
Reconnaissons-le, Poutine est certainement un dirigeant aussi peu recommandable que Chavez, que beaucoup à gauche respectent et même admirent. Il est le chef d’un régime pétro-autoritaire qui se maintient au pouvoir grâce à la rente que les matières premières lui procure abondamment. Ni plus, ni moins.
Source