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Mali : le jihadiste français a servi dans la police

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C’est un témoignage rare, car le sujet est sensible. Sonia*, la sœur d’un jihadiste français arrêté il y a quelques jours dans le nord du Mali, a décidé de sortir du silence. Révoltée par le comportement de son frère, elle confie sa colère et son incompréhension. Djamel, 37 ans, a été arrêté les armes à la main par l’armée française. Au terme d’un parcours étonnant. Car avant d’aller combattre aux côtés des islamistes du Mali, il a servi dans les rangs de la police nationale. 

Sonia, mère de famille de 30 ans, réside dans la région grenobloise. C’est là que Djamel, de nationalité franco-algérienne, a longtemps vécu avant de partir à Bonneville (Haute-Savoie) où il s’est marié. Puis il est revenu à Grenoble, chez sa mère, lorsqu’il s’est séparé de son épouse avec laquelle il a eu trois garçons, âgés de 6, 4 et 1 an et demi. Aujourd’hui, Sonia a des mots très durs contre son frère : « J’ai honte de ce qu’il a fait, j’ai honte de ce qu’il est devenu. Depuis que j’ai su qu’il était au Mali, ce n’est plus mon frère. Ce n’est plus un membre de la famille. Il a commis le pire du pire : combattre les troupes françaises alors que c’est la France qui l’a fait grandir, lui a permis d’étudier, de travailler, d’avoir une femme, des enfants… » 

La sœur du jihadiste s’interrompt puis reprend sur le même ton. « Il a trahi sa famille, il a trahi une nation, il a trahi la France. Il s’est aussi trahi lui-même. Car il a demandé à être français. Détenir une carte d’identité française et aller combattre la France, il faut vraiment être culotté. Il a fait du mal à tout le monde. Il faut qu’il paye! » martèle Sonia. 

Le père de Djamel, ouvrier spécialisé dans la chimie, a quitté l’Algérie pour la France en 1977, avant de faire venir sa famille à Grenoble. Djamel, un de ses quatre fils, commence par se distinguer dans le domaine sportif : « Il faisait de l’athlétisme, à un très bon niveau », se rappelle Sonia. A sa majorité, Djamel demande la nationalité française. Qu’il obtient. « A la fin des années 1990, il a travaillé dans la police, témoigne Sonia. A la BAC, la brigade anticriminalité de Grenoble. Il a donc porté l’uniforme français. C’est vrai que cela peut paraître hallucinant, lorsqu’on voit ce qu’il est devenu aujourd’hui. Il voulait devenir CRS. Il est resté environ un an au sein de la BAC. » La sœur s’attarde sur un épisode : « Un jour, lors d’une course-poursuite, Djamel a été confronté à une situation très particulière. Il a été obligé d’arrêter son frère. Ses collègues lui avaient alors lancé quelques piques. C’est une des raisons de son départ. » 

Djamel quitte ensuite Grenoble pour rejoindre un de ses frères en Haute-Savoie, dans la vallée de l’Arve. C’est à Bonneville qu’il rencontre sa future épouse. « A cette époque, Djamel était comme tout le monde. Il aimait faire la fête. Il allait à la mosquée, sans plus. Après son mariage en 2005, il a commencé à se faire pousser la barbe, à avoir de mauvaises fréquentations avec des barbus qui essayaient d’endoctriner des jeunes. Il nous disait qu’il allait juste faire sa prière, que cela n’allait pas plus loin. Ensuite, je ne sais pas comment il a basculé », reconnaît Sonia. Djamel multiplie les emplois : agent de sécurité, maintenance d’engins de chantier, employé dans un abattoir… Il connaît aussi de sérieuses difficultés dans son couple. « Il ne s’occupait plus de ses enfants, de sa femme. Il était devenu salafiste, portait des qamis, les djellabas des salafistes. Il disait parfois qu’il allait rejoindre Al-Qaïda. » Pour ses proches, ce ne sont alors que des paroles en l’air. 

En novembre dernier, alors qu’il vivait chez sa mère à Grenoble, Djamel lui annonce qu’il part travailler à Paris. « Puis, un jour, il a appelé sa femme en lui demandant de lui passer ses enfants. Ma belle-sœur s’est alors aperçue qu’il appelait de l’étranger. Elle a vérifié ensuite le numéro et a vu qu’il téléphonait du Mali! On ne s’attendait vraiment pas à ce qu’il passe à l’acte comme ça », confie Sonia, aussi effondrée qu’en colère. 

« On vit en France, on respecte la laïcité. On ne renie pas notre religion qui fait partie de notre vie. Mais de là à partir comme ça faire le jihad, non! C’est pour cela que j’espère qu’il paiera. Mais avant, il faut qu’il s’explique, vis-à-vis de sa famille, de la France. Qu’il dise pourquoi il a fait ça, comment il en est arrivé là », lance Sonia. Au Mali, Djamel attendrait toujours son extradition. La semaine dernière, son épouse et sa mère ont été longuement entendues par la police. 

* Le prénom a été changé.

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