Le tribunal correctionnel d'Evry a relaxé Mohammed, seul majeur jugé pour l'attaque du RER D en gare de Grigny le 16 mars dernier.
"On a gagné!" Le seul jeune homme majeur renvoyé en correctionnelle pour l'attaque du RER D en gare de Grigny le 16 mars dernier a été relaxé.
Ils sont nombreux ce vendredi à avoir fait le déplacement au tribunal d’Évry (Essonne) pour assister au procès de Mohammed T.. Des journalistes, mais aussi des jeunes des alentours et surtout des copains de lycée. Le jeune homme, âgé de 18 ans et élève en Terminale, habite Grigny depuis huit ans. Il est arrivé au Palais de justice aux côtés de son avocat, Me Raoul Briolin, Nike aux pieds, survêtement bleu électrique et doudoune assortie.
"Reconnaissez-vous les faits ?"
Après avoir rappelé au prévenu qu'il avait le droit de ne pas répondre à ses questions, le président du tribunal est allé droit au but: "Reconnaissez-vous les faits qui vous sont reprochés ?"
L'intéressé: "Non." Mohammed nie les faits, il n'a "jamais été en gare de Grigny le 16 mars". Le soir de l'attaque, assure-t-il mollement, il s'est rendu à un concert de rap et de foot en salle à Grigny 2. Il y est resté de 19 heures "à 23h40" et n'est sorti que pour "fumer une cigarette". S'il était accompagné? "C'était juste des copains."
Copains dont il préfère taire l'identité. Or, sans eux, impossible d'attester de sa présence, ou non, à l'événement et donc en gare de Grigny.
"C'est le roi des menteurs"
A l'audience, seule une victime est présente, et elle dit reconnaître le prévenu. "Il faisait partie de mes agresseurs." Un policier en service le soir de l'attaque, ancien de la BAC, cité comme témoin, identifie également Mohammed comme étant un des auteurs de l'agression.
Les caméras de surveillance de la SNCF ont capté la scène, de l'arrivée à la sortie des malfaiteurs. Pour se faire son idée, le tribunal avait pris le parti de visionner les bandes - sélectionnées par le ministère public - pour la première fois ce vendredi. Play: des dizaines de jeunes habillés en noir et la tête couverte sautent par dessus les tourniquets. Les images sont saccadées. Les malfrats atteignent le quai et attendent l'arrivée du train. Ils sont agités. "C'est mort, c'est cramé, on les voit trop bien", chuchote un jeune homme dans le public.
Mohammed jette un œil dans leur direction. Le policier, "physionomiste" par définition, s'approche de l'écran à la demande du président et désigne du doigt le jeune homme à la casquette grise. Selon lui, il s'agit du prévenu, auquel il a déjà eu à faire dans le passé. "C'est le roi des menteurs, répète à l'envi le bavard du public, il [Mohammed] n'a rien à voir avec ça."D'après cet observateur, visiblement bien informé, certains agresseurs seraient donc clairement identifiables sur les bandes, mais pas Mohammed...
Avec une pointe d'humour, Me Briolin estime qu'on n'y voit rien, que "c'est noir sur noir". Les images sur lesquelles le témoin et la victime disent identifier Mohammed sont prises sur le quai, ce qui, souligne-t-il, ne prouve en rien que son client - si c'est de lui dont il s'agit - a rançonné des passagers.
Alors que le procureur avait requis deux ans de prison dont six mois avec sursis, les soutiens du relaxé crient victoire. Au micro des journalistes, pourtant, les mots ont du mal à sortir de sa bouche. Ses copains, venus en nombre, jouent les anti-sèche. "Ouais c'est la vérité qui est ressortie. (...) Ça m'a chamboulé mais je vais essayer de me relever." Mohammed a l'air de tout sauf d'être abattu. "J'étais sûr de moi et de mon avocat, c'est la confiance", se justifie-t-il. L'absence d'"éléments à charge" plutôt, comme l'a souligné le président du tribunal.
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