Ce lundi, à Oslo, à l’occasion de la remise du prix Nobel de la paix à l’Union européenne, François Hollande a réitéré son propos tenu au Monde le 17 octobre dernier : la crise de la zone euro « est derrière nous ». Écoutons-le :
La Grèce, nous avons enfin apporté les fonds qu’elle attendait. L’Espagne, nous avons permis au secteur bancaire d’être renfloué. L’Italie, même s’il y a une incertitude politique, je suis sûr que les Italiens vont y répondre, comme il convient. […] Et donc, tout ce que nous avons à faire ce n’est plus simplement de sortir de la crise de la zone euro: c’est fait.
Méthode Coué quand tu nous tiens.
N’en déplaise à notre président, la crise de l’euro est plus que jamais devant nous. Explication : les États de l’UE sont endettés pour une seule et unique raison, raison d’ailleurs ignorée ou occultée par nos grands médias : l’article 123 du traité de Lisbonne, ex-article 104 du traité de Maastricht, dont l’objet est la privatisation totale de la création monétaire des États. Au titre de cet article, il est interdit aux États d’emprunter des capitaux à taux zéro auprès d’une banque centrale. Conséquence : pour financer leur déficit, les États sont contraints d’emprunter auprès des marchés financiers. Petit problème, contrairement aux prêts contractés auprès d’une banque centrale, les prêts contractés auprès des marchés financiers comportent des intérêts.
Pour ne parler que du cas français, chaque année, les intérêts de la dette sont équivalents aux recettes de l’impôt sur le revenu, soit près de 50 milliards d’euros. 1 Compte tenu de l’occultation médiatique sur le sujet, la chose paraît difficile à croire, mais il en est ainsi : la dette des pays de l’UE n’est rien d’autre que le résultat de l’accumulation, durant des décennies, d’intérêts gigantesques dont le paiement a rendu impossible le remboursement du capital de la dette. Pas de taux d’intérêt, pas de dette.
Moralité ? Les dettes des États membres de l’UE ne seront pas remboursables tant que de nouveaux intérêts viendront s’empiler toujours plus lourdement d’année en année sur des finances publiques déjà sur les rotules. Autrement dit, tant que les États de l’UE resteront liés à la politique de dette dictée par les traités européens, leur dette ne pourra structurellement qu’augmenter. Sauf cas de banqueroute partielle, tout remboursement de la dette est absolument inenvisageable.
Si les États de l’Union européenne se résolvent à rembourser leur dette, et ce sera le cas pour éviter un chaos social généralisé à l’échelle de l’Europe, alors, tôt ou tard, ils seront forcés par les circonstances de quitter l’Union européenne. Or, en quittant l’UE, c’est aussi l’euro qu’ils abandonneront.
Tous les efforts budgétaires prévus par la TSCG n’y pourront rien, tous les « quantitative easing » de la BCE ainsi que tous les prêts du MES resteront coups d’épée dans l’eau. Les jeux sont déjà faits. L’euro a été condamné à mort par la privatisation de la création monétaire. On peut aujourd’hui l’affirmer sans trembler : l’euro est un mort-vivant.
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