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L’inexorable expansion du capitalisme sécuritaire

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Depuis le printemps 2011, les opérations de « guerre policière » menées contre les peuples d’Afrique, d’Asie, d’Europe et d’Amérique engendrent de gigantesques commandes sur le marché international de la coercition. Cette hausse brutale de la demande sur le marché sécuritaire devrait continuer à avoir un impact profond sur les violences policières. « Quand on vend du matériel, c’est pour que les clients s’en servent » assurait ainsi Serge Dassault, en mars 2011, au sujet des contrats passés avec plusieurs dictatures arabes pour des techniques et des matériels de maintien de l’ordre. Ce même mois de mars 2011, un projet de loi est adopté par le Sénat, pour libéraliser les exportations et les importations de matériels de guerre et « assimilés ». En assouplissant considérablement le contrôle des autorisations à l’exportation, notamment en dehors de l’Union européenne, il permet de favoriser « l’excellence » française sur le marché international de la coercition. 

Deux grands types de gestion publique de la police se passent le relais à la tête de l’Etat français et permettent, par leur succession, que s’opère le développement du marché national de la coercition. Le premier, parfois désigné comme « de droite », consiste à développer l’innovation technologique et à doter les policiers de nouvelles armes pour compenser des réductions d’effectifs. Le second type, parfois dit « de gauche », consiste à multiplier les effectifs et à étendre la dotation de ces armes dans la police. L’alternance de ces deux modèles à la tête de l’Etat permet de soutenir successivement des cycles de recherche/développement et des cycles de fabrication/dotation. La possibilité d’expérimenter régulièrement ces marchandises dans des laboratoires humains, et de mettre en scène médiatiquement leur efficacité, permet ensuite à l’industrie sécuritaire française de s’étendre sur le marché international
     Le capitalisme sécuritaire s’organise autour des marchés politiques et économiques du contrôle et de la guerre. Il se déploie en particulier là où des Etats impérialistes ont circonscrit, à l’intérieur de leur territoire, des lieux et des milieux où ils peuvent déployer, tester, promouvoir ces marchandises. Le géographe Stephen Graham a étudié la manière dont les « opérations extérieures » des grandes puissances impérialistes « servent de banc d’essai à la technologie et aux techniques qui seront ensuite vendues sur le marché en plein essor de la sécurité nationale à travers le monde ». Il explique que « des méthodes de pacification, de militarisation et de contrôle ouvertement colonialistes et affinées dans les villes du Sud se répandent par l’effet d’imitation dans les villes du Nord qui forment le centre névralgique du capitalisme. » L’industrie de la coercition détermine un phénomène similaire dans le domaine de la violence policière à l’intérieur des grandes puissances impérialistes. 

Mathieu Rigouste, La domination policière

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