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Mariage pour tous : les juristes pour, sont contre

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Telle est la conclusion des auditions du 20 décembre 2012 sur le projet de loi mariage pour tous, consacrées à l’approche des juristes. 
Comment s’explique cette apparence de contradiction ? Tout simplement parce que quelle que soit leur position personnelle, les juristes ont tous dénoncé la façon dont ce projet était rédigé. 

Au centre des critiques, d’abord le périmètre de la loi.- Les cinq juristes auditionnés, Hugues Fulchiron, Annick Batteur, Laurence Brunet, Claire Neirinck et Guillaume Drago ont remis en question le périmètre de la loi. Si le cœur de ce projet de loi est bien d’ouvrir le mariage aux couples de même sexe, il faut bien avoir conscience, ont-ils rappelé, que c’est tout le droit de la filiation et de la procréation médicalement assistée (PMA) qui est touché. Rappelons que le droit de la filiation est en France fondée sur la vraisemblance biologique et sur une filiation sexuée. Or, parce qu’il n’aborde que certains points et pas d’autres (PMA, gestation pour autrui, présomption de paternité, etc.), le Conseil constitutionnel pourrait soulever la question de l’intelligibilité de la loi et de l’incompétence négative du législateur, selon Guillaume Drago

Questions autour de l’ouverture de l’adoption.- Pour Hugues Fulchiron, le projet de loi procède de façon un peu étonnante. Le législateur considère que, puisque le mariage est ouvert aux couples homosexuels, il faut ouvrir l’adoption. Mais parallèlement, le texte entend décorréler mariage et filiation. Une rupture logique non satisfaisante pour ce spécialiste du droit de la famille, qui demande que toutes les règles de l’adoption soient dès lors repensées. Tout comme celles de la PMA. Pourquoi limiter la PMA aux couples mariés ? Pourra-t-on longtemps refuser l’accès aux personnes seules ? Ou interdire la multiparenté ? La PMA doit faire l’objet d’une réflexion d’ensemble. Opinion, là encore, très largement partagée par les personnes auditionnées. 

De la suppression des mots « père » et « mère » dans le Titre V du Livre I du Code civil.- Annick Batteur a démontré qu’il n’était pas nécessaire de supprimer ces deux concepts et a d’ailleurs demandé au législateur de reprendre l’ensemble des dispositions du projet de loi, dénonçant l’erreur que constitue cette suppression : « même quand on est très favorable au projet, on ne peut pas admettre la façon dont ce projet est rédigé », a-t-elle insisté. Sans compter les coquilles qu’elle entraîne, par exemple quand le remplacement de ces mots par celui de « membre de la famille » implique que le juge doive convoquer tous les membres de la famille pour vérifier leur consentement au mariage de la personne protégée.Autre point soulevé par cette juriste, comment aborder la question du statut des enfants des couples homosexuels, au regard de l’article 57 du Code civil ? Avec en arrière-plan, bien évidemment, la question de l’accès aux origines et de l’anonymat. Sa conclusion : ouvrons seulement l’adoption simple, dans un premier temps, et travaillons à un texte cohérent sur l’ensemble du droit de la famille. Laurence Brunet s’est également prononcée pour l’ouverture de la seule adoption simple et a demandé que le législateur se penche sur le droit de l’enfant à connaître ses origines. Elle a soutenu qu’il n’est pas nécessaire de supprimer les mots « père » et « mère ». Et « il faut éviter de désexualiser l’acte de naissance » a-t-elle ajouté. De même, pour Laurence Brunet, l’ouverture du don de gamète aux couples de femmes devra entraîner la mention du donneur sur l’acte de naissance. 

Les piliers du droit de la filiation devront être revus.- Claire Neirinck est notamment revenue sur la difficulté de remettre en cause une comaternité ou une copaternité, l’expertise biologique, bien évidemment, ne pouvant être un instrument utile. D’où cette remarque : une inégalité est créée par ce projet de loi entre un couple homosexuel, dont la filiation ne pourra pas facilement être contestée, et un couple hétérosexuel, qui pourra voir une filiation détruite par la preuve biologique. Même réflexion s’agissant de l’adoption de l’enfant de l’époux/épouse, prévue par les articles 357 et 365 du Code civil : elle sera possible dans un couple homosexuel, mais pas dans un couple hétérosexuel, dès lors que l’enfant a déjà deux parents. Une nouvelle source de discrimination. Pour Claire Neirinck, l’ouverture de la PMA aux couples de même sexe entraînera forcément la légalisation de la gestation pour autrui. Faute de quoi, une inégalité apparaîtrait entre les couples de même sexe, ceux de femmes qui auraient droit à la PMA et ceux d’hommes à qui ce droit serait refusé. D’ailleurs, en Espagne, les juristes sont confrontés à cette revendication des couples d’hommes. 

Des propos annonciateurs d’un grand nombre d’amendements ?

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