Des centaines de milliers de tracts, des TGV spéciaux et des centaines de cars, des collages d'affiches à l'aube et des débats le soir: les opposants au mariage homosexuel sont sur le pont, battant le rappel partout en France avant leur manifestation dimanche à Paris.
A quelques jours de l'ouverture des débats à l'Assemblée nationale sur le projet de loi ouvrant le mariage et l'adoption aux couples homosexuels, les opposants espèrent rassembler plusieurs centaines de milliers de personnes à Paris. Une double-rame TGV, d'environ 1.000 personnes, quittera Bordeaux dimanche. En Rhône-Alpes, où un TGV spécial de 800 personnes partira de Lyon, selon Raphaël Nogier, membre du collectif organisateur. Des cars ont été affrétés par des associations, des paroisses, de simples particuliers. Dans le Grand Ouest - où 500.000 tracts ont été distribués - 310 cars d'une capacité de 50 personnes transporteront les manifestants à Paris. Et 500 cars pourront également être mobilisés dans le Nord/Pas-de-Calais, depuis 50 points de départ.
"Solidarité"
Pour réduire le prix du transport la solidarité entre manifestants a joué, dit François-Régis, coordinateur du collectif "Manif pour tous" dans le Grand-Ouest : les plus anciens, trop âgés pour marcher des heures, ont fait des dons pour permettre aux plus jeunes de participer. Résultat, en Vendée par exemple, la création d'un "Pass famille" à 90 euros. Nombre de déplacements échappent néanmoins au décompte des organisateurs: "il y a énormément de covoiturage et beaucoup de manifestants se rendront à Paris par leurs propres moyens", note François-Régis.
Selon le coordinateur pour le Sud-Ouest, Raphaël de Bourayne, des élus "organisent d'eux-mêmes des déplacements, des cars". "Dans ces cas il n'y a pas d'histoire d'étiquette, droite ou gauche", explique-t-il. Le jour J approchant, des chars sont en cours de confection en Ile-de-France. Et les banderoles et pancartes feront le plus possible référence aux régions, pour souligner la mobilisation à travers tout le territoire. Les anti-mariage gay ont multiplié les réunions publiques et les débats.
Des équipes de bénévoles ont aussi distribué des tracts. A Lille, une demi-douzaine de membres du collectif, dont des musulmans, ont opéré dimanche sur le marché de Wazemmes. "On s'est retrouvés sur le fait qu'on touche à un maillon très important, qui peut déstabiliser la famille, sans qu'il y ait vraiment de débat de société ou de réflexion profonde", a expliqué Rachid Laamarti, du collectif Action Citoyenne, en lien avec la Ligue islamique du Nord et le collectif des mosquées roubaisiennes.
Les colleurs d'affiches ont aussi battu le pavé, notamment à Nantes, où 3.500 affiches ont été apposées en dix jours par une vingtaine de volontaires, entre 5 et 7 heures du matin "sinon elle sont vite arrachées", reconnaît François-Régis. "Tous les matins il faut recommencer, mais cela fait partie du jeu et les gens sont motivés", explique-t-il. Des préparatifs vus d'un oeil sceptique à la sortie de la messe dimanche devant l'église saint Pie V à Rennes: "manifester ne changera rien", résume Sylvie, mantille noire à la main. "On priera, c'est tout ce qu'il reste à faire", dit-elle. Dans le même temps, le débat continue de susciter de vifs commentaires dans la classe politique.
Le député FN Gilbert Collard a appelé mardi à "écraser (...) du pied gauche, ça porte bonheur" le ministre de l'Education Vincent Peillon qui a mis en garde contre des débats sur cette réforme qu'organiserait l'enseignement catholique. Mais la présidente du FN a annoncé mardi que son parti n'appelait pas à manifester, tout en laissant à ses élus et militants le choix de participer à la manifestation de dimanche.
Côté UMP, l'ex-Premier ministre Jean-Pierre Raffarin a estimé que le président François Hollande était "imprudent" sur la réforme du mariage et prenait le risque de "diviser".
Le député PS Jean-Christophe Cambadélis a assuré mardi qu'à chaque fois que la gauche est au pouvoir, la hiérarchie de l'église catholique descend dans la rue. Par ailleurs, selon un sondage Ifop publié mardi pour le magazine Pèlerin, les Français restent très majoritairement (60%) favorables au mariage homosexuel même s'ils considèrent que c'est une question "secondaire".
Libération