Le pistolet à impulsion électrique est une autre arme qui montre l’impact de l’industrie de la coercition sur la violence d’Etat. Il permet d’appliquer à distance et à répétition des décharges électriques interrompant la communication entre les neurones et les muscles.
La société SMP Technologies, qui commercialise le Taser, fournit les polices des Etats-Unis et du Canada depuis 1999. Le pistolet équiperait à l’heure actuelle plus de 11 000 services américains de maintien de l’ordre et une soixantaine de pays. Dès la fin 2004, le Raid, le GIGN et par la suite les sept GIPN du Taser X26 pour l’expérimenter. Un appel d’offres est lancé par la suite pour équiper la police et la gendarmerie. En août 2006, la société SMP Technologies (Taser France) remporte un marché de 7,5 millions d’euros. Nicolas Sarkozy dote la police et la gendarmerie de 4 000 exemplaires.
Alors que l’emploi de l’électricité pendant la guerre d’Algérie servait principalement à torturer pour obtenir du renseignement et terroriser les colonisés, les pistolets à impulsions électriques ont pour but de paralyser pour favoriser la capture. Ils fournissent pourtant aux policiers un nouveau moyen de brutalisation systématique.
Le meurtre de Mamadou Marega par la police, dans la nuit du 29 au 30 novembre 2010, révèle la banalisation de l’usage du Taser. Interpellé par des policiers de la BAC dans un appartement à Colombes, il est « maîtrisé » à coups de matraques, de gaz lacrymogènes et de plusieurs décharges de Taser. Il meurt, entravé aux mains et aux pieds. [...] Mamadou Marega a enduré un supplice infligé par la plupart des nouvelles armes de coercition à la disposition des policiers.
L’usage du pistolet à impulsion électrique dans les quartiers populaires normalise un système de contrôle politique basé sur la peur d’être électrocuté parce qu’on refuse un contrôle d’identité, qu’on tente de l’éviter ou que l’on ne s’y soumet pas de manière assez satisfaisante. Il est associé à d’autres dispositifs (matraques, gazages, tirs de flash-balls, clefs d’étranglement, humiliations et menaces, interpellations, mises en garde et enfermements...) pour mettre en œuvre une véritable torture sociale, c’est-à-dire un système de violence visant à soumettre l’ensemble d’une « population » en brutalisant régulièrement certains de ses membres.
Mathieu Rigouste,
La domination policière