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Casus Belli - Enfant de Troupe
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Belle et rebelle
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Le complexe militaro-industriel français et le marché du contrôle aérien
Le PDG [de SMP Technologies] envisage un autre secteur très porteur, les drones armés – de petits avions sans pilotes, téléguidés, capables de repérer « les meneurs » « dans le cadre d’une émeute » et de les neutraliser à l’aide d’une balle lancé par le X pistol, un petit canon qu’on a placé sous le drone. « On a fait des exercices de simulation à l’étranger » ajoute Antoine Di Zazzo. Selon lui la police française aurait acheté ce type d’appareils, dont l’unité coûte 18 000 euros, en 2009.
Le drone reste encore très peu employé dans la police française, et principalement pour la surveillance. En juillet 2006, un avion de type Cessna, équipé d’une caméra vidéo télécommandée, survole la Seine-Saint-Denis. Un autre vol a lieu en décembre 2006, équipé « d’une caméra thermique embarquée pour déceler d’éventuels débordements et les voitures brûlées de la Saint-Sylvestre. » La police française expérimente un drone nommé Elsa (Engin léger de surveillance aérienne), conçu et fabriqué par la société Sirehna, à Nantes. Présenté comme « furtif et léger », il est chargé de surveiller les « zones urbaines sensibles » ou les « manifestations ».
Le développement de drones policiers susceptibles de frapper et de capturer des « suspects » est un axe majeur pour le marché de la coercition, mais il reste pour l’instant cantonné dans l’industrie et les répertoires militaires. A l’annonce d’une coopération franco-britannique pour évaluer le drone Watchkeeper de Thalès, fin 2012, Victor Chavez, directeur général de Thalès UK, résume : « Sur le plan industriel, les systèmes de drone sont essentiels au renouveau du secteur de la Défense. C’est là une occasion fantastique pour les entreprises européennes de s’imposer sur ce marché en plein essor. »
En France, le contrôle policier aérien se matérialise pour l’instant par l’emploi de l’hélicoptère pour « l’antiémeute ». Depuis 2005, à Villiers-le-Bel comme dans de nombreux quartiers populaires, dans le cadre de sommets internationaux ou de manifestations jugées particulièrement indisciplinées, l’hélicoptère est employé de plus en plus régulièrement. L’industrie de l’hélicoptère militaire, qui doit beaucoup à la contre-insurrection et à son exportation internationale, trouve un nouveau secteur de développement dans la guerre policière. Son application pour les « violences urbaines » suppose une conversion de ses usages dans un cadre ultramédiatique et policier. En 2012, Eurocopter mène une tournée internationale de promotion d’un nouvel hélicoptère « hybride » à grande vitese, le X3, destiné aux forces civiles et militaires : recherche et sauvetage, surveillance du littoral maritime, missions de patrouille aux frontières, transport de passagers, transport aérien offshore, missions militaires, opérations menées par les forces spéciales, transport de troupe, combat.
Comme le rapporte le commissaire divisionnaire Christian Hirsoil, directeur départemental adjoint de la sécurité publique de Seine-et-Marne, il s’agit de transporter des troupes d’élite dans des zones urbaines et au milieu d’une population civile massivement insoumise. Le renseignement, l’intimidation et la dissuasion sont d’autres « atouts » de l’hélicoptère antiémeute. « Quand on intervient pour maintenir l’ordre public, en cas d’échauffourées ou de guet-apens par exemple, on peut employer un passage hélico qui dispose d’un zoom énorme pour voir ce qu’il se passe : est-ce qu’ils ont mis des bouteilles sur le toit des immeubles ? Est-ce que les trappes d’accès sont pétées ? »
Mais l’hélicoptère de guerre policière est aussi un instrument de coercition. Le vacarme, la lumière et la portée symbolique d’un matériel militaire lourd agressent l’ensemble d’un quartier pendant souvent plusieurs nuits consécutives, troublant le sommeil et donc le travail et la vie sociale. Il permet d’appliquer une forme de torture grise à l’ensemble d’un quartier urbain.
Le drone reste encore très peu employé dans la police française, et principalement pour la surveillance. En juillet 2006, un avion de type Cessna, équipé d’une caméra vidéo télécommandée, survole la Seine-Saint-Denis. Un autre vol a lieu en décembre 2006, équipé « d’une caméra thermique embarquée pour déceler d’éventuels débordements et les voitures brûlées de la Saint-Sylvestre. » La police française expérimente un drone nommé Elsa (Engin léger de surveillance aérienne), conçu et fabriqué par la société Sirehna, à Nantes. Présenté comme « furtif et léger », il est chargé de surveiller les « zones urbaines sensibles » ou les « manifestations ».
Le développement de drones policiers susceptibles de frapper et de capturer des « suspects » est un axe majeur pour le marché de la coercition, mais il reste pour l’instant cantonné dans l’industrie et les répertoires militaires. A l’annonce d’une coopération franco-britannique pour évaluer le drone Watchkeeper de Thalès, fin 2012, Victor Chavez, directeur général de Thalès UK, résume : « Sur le plan industriel, les systèmes de drone sont essentiels au renouveau du secteur de la Défense. C’est là une occasion fantastique pour les entreprises européennes de s’imposer sur ce marché en plein essor. »
En France, le contrôle policier aérien se matérialise pour l’instant par l’emploi de l’hélicoptère pour « l’antiémeute ». Depuis 2005, à Villiers-le-Bel comme dans de nombreux quartiers populaires, dans le cadre de sommets internationaux ou de manifestations jugées particulièrement indisciplinées, l’hélicoptère est employé de plus en plus régulièrement. L’industrie de l’hélicoptère militaire, qui doit beaucoup à la contre-insurrection et à son exportation internationale, trouve un nouveau secteur de développement dans la guerre policière. Son application pour les « violences urbaines » suppose une conversion de ses usages dans un cadre ultramédiatique et policier. En 2012, Eurocopter mène une tournée internationale de promotion d’un nouvel hélicoptère « hybride » à grande vitese, le X3, destiné aux forces civiles et militaires : recherche et sauvetage, surveillance du littoral maritime, missions de patrouille aux frontières, transport de passagers, transport aérien offshore, missions militaires, opérations menées par les forces spéciales, transport de troupe, combat.
Comme le rapporte le commissaire divisionnaire Christian Hirsoil, directeur départemental adjoint de la sécurité publique de Seine-et-Marne, il s’agit de transporter des troupes d’élite dans des zones urbaines et au milieu d’une population civile massivement insoumise. Le renseignement, l’intimidation et la dissuasion sont d’autres « atouts » de l’hélicoptère antiémeute. « Quand on intervient pour maintenir l’ordre public, en cas d’échauffourées ou de guet-apens par exemple, on peut employer un passage hélico qui dispose d’un zoom énorme pour voir ce qu’il se passe : est-ce qu’ils ont mis des bouteilles sur le toit des immeubles ? Est-ce que les trappes d’accès sont pétées ? »
Mais l’hélicoptère de guerre policière est aussi un instrument de coercition. Le vacarme, la lumière et la portée symbolique d’un matériel militaire lourd agressent l’ensemble d’un quartier pendant souvent plusieurs nuits consécutives, troublant le sommeil et donc le travail et la vie sociale. Il permet d’appliquer une forme de torture grise à l’ensemble d’un quartier urbain.
Mathieu Rigouste, La domination policière
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Corée du Nord : l'effrayant témoignage d'un garde des camps de prisonniers
«Il y avait trois chiens et ils ont tué cinq enfants» témoigne, à Genève (Suisse), Ahn Myong-Chol, garde pendant huit ans dans les camps de prisonniers de Corée du Nord où l'horreur se décline au quotidien.
«Echappant à leurs maîtres, les chiens se sont jetés sur des enfants qui revenaient de l'école du camp. Ils en ont tué immédiatement trois, les deux autres enfants respiraient à peine et ont été enterrés vivants par les gardes», a-t-il dit via un interprète. Le lendemain, au lieu de liquider les chiens, les gardes les ont cajolés et «récompensés avec de la nourriture spéciale», ajoute Ahn avec un signe de dégoût.
Ce Nord-Coréen a témoigné à Genève lors d'une conférence des défenseurs des droits de l'homme, avant que le Conseil des droits de l'Homme des Nations Unies examine en mars un rapport accablant sur les violations de ces droits par Pyongyang.
Un des témoins auditionnés par la commission d'enquête de l'ONU
Ahn, réfugié en Corée du Sud, est un des témoins auditionnés par la Commission d'enquête de l'ONU qui a dénoncé dans ce rapport diffusé la semaine dernière des «crimes contre l'humanité» et a appelé la communauté internationale à réagir. La Commission estime notamment que «des centaines de milliers de prisonniers politiques ont péri dans des camps pendant les 50 dernières années», «graduellement éliminés par des famines délibérées, le travail forcé, les exécutions, la torture, les viols.»
«Les gens dans les camps ne sont pas traités comme des humains. Ils sont comme des mouches que l'on peut écraser», affirme Ahn, qui a fui la Corée du Nord en 1994.
Il a servi dans quatre de ces camps du goulag nord-coréen, dans ce qui est nommé les «zones de contrôle total». Les prisonniers y travaillent de 16 à 18 heures par jour, dorment 4 à 5 heures, et reçoivent trois fois 100 grammes de bouillie pour peu qu'ils atteignent les objectifs de travail. «Tous les jours il en mourait de faim, d'épuisement, par accident», raconte ce fils d'un cadre local, sélectionné à l'âge de 18 ans pour devenir gardien parce qu'issu d'une famille de cadre.
Dans sa première affectation, au camp 14 au nord de Pyongyang, on l'encourage à pratiquer sa connaissance du Tae Kwon Do contre les prisonniers, après un grand lavage de cerveau pour qu'il considère les prisonniers comme l'incarnation du «Mal».
L'université comme récompense pour avoir tué les prisonniers-fuyards
«Nous étions encouragés à tuer ceux qui essayaient de s'échapper, explique-t-il.Nous avions le droit de les tuer et si nous ramenions le corps, nous pouvions être récompensés par l'envoi à l'université», explique-t-il, affirmant que certains gardes faisaient exprès de faire sortir des prisonniers du camp pour les tuer et obtenir cette récompense.
Ahn, qui admet avoir participé aux violences mais pense n'avoir jamais tué, a été promu chauffeur, ce qui lui permet alors de voir de nombreux prisonniers et de découvrir que certains étaient là depuis l'âge de 2 ou 4 ans, que d'autres étaient nés dans les camps. «0% d'entre eux ne savaient pourquoi ils étaient là.»«J'avais été entraîné à repérer les mensonges, en observant les mouvements des yeux, des lèvres (...) mais ils avaient bien trop peur d'être punis s'ils ne disaient pas la vérité», assure-t-il.
En 1994, en retournant chez lui pendant une permission il découvre que son père, un jour d'ivresse, a critiqué les dirigeants, et a préféré ensuite se suicider. Sa mère, sa sœur et son frère sont arrêtés, il n'aura plus jamais de nouvelles d'eux.
La Commission d'enquête de l'ONU a souligné que les familles de personnes jugées hostiles étaient systèmatiquement envoyées dans les camps. Craignant pour son sort, Ahn profite de son camion pour se rendre à la frontière chinoise et traverser à la nage la rivière Du Man. Installé en Corée du sud, il travaillera dans une banque avant de choisir il y a trois ans de rejoindre l'ONG «Libérez le goulag nord-coréen». «Quand on parle de goulag, avec la Corée du nord, il faut parler au présent, ces horreurs continuent», souligne-t-il, affirmant qu'avec le dirigeant actuel Kim Jon-un «la population est tétanisée par la peur». Et Kim Jong-Un, aurait entre autres ordonné en janvier dernier que son oncle, Jang Song-Thaek, 67 ans, soit dévoré par une horde de chiens affamés.
La Commission de l'ONU a établi que le nombre de camps et de prisonniers a diminué suite aux décès et à quelques libérations mais elle estime que «80 000 à 120 000 prisonniers politiques sont actuellement détenus dans quatre grands camps prisons».
«Echappant à leurs maîtres, les chiens se sont jetés sur des enfants qui revenaient de l'école du camp. Ils en ont tué immédiatement trois, les deux autres enfants respiraient à peine et ont été enterrés vivants par les gardes», a-t-il dit via un interprète. Le lendemain, au lieu de liquider les chiens, les gardes les ont cajolés et «récompensés avec de la nourriture spéciale», ajoute Ahn avec un signe de dégoût.
Ce Nord-Coréen a témoigné à Genève lors d'une conférence des défenseurs des droits de l'homme, avant que le Conseil des droits de l'Homme des Nations Unies examine en mars un rapport accablant sur les violations de ces droits par Pyongyang.
Un des témoins auditionnés par la commission d'enquête de l'ONU
Ahn, réfugié en Corée du Sud, est un des témoins auditionnés par la Commission d'enquête de l'ONU qui a dénoncé dans ce rapport diffusé la semaine dernière des «crimes contre l'humanité» et a appelé la communauté internationale à réagir. La Commission estime notamment que «des centaines de milliers de prisonniers politiques ont péri dans des camps pendant les 50 dernières années», «graduellement éliminés par des famines délibérées, le travail forcé, les exécutions, la torture, les viols.»
«Les gens dans les camps ne sont pas traités comme des humains. Ils sont comme des mouches que l'on peut écraser», affirme Ahn, qui a fui la Corée du Nord en 1994.
Il a servi dans quatre de ces camps du goulag nord-coréen, dans ce qui est nommé les «zones de contrôle total». Les prisonniers y travaillent de 16 à 18 heures par jour, dorment 4 à 5 heures, et reçoivent trois fois 100 grammes de bouillie pour peu qu'ils atteignent les objectifs de travail. «Tous les jours il en mourait de faim, d'épuisement, par accident», raconte ce fils d'un cadre local, sélectionné à l'âge de 18 ans pour devenir gardien parce qu'issu d'une famille de cadre.
Dans sa première affectation, au camp 14 au nord de Pyongyang, on l'encourage à pratiquer sa connaissance du Tae Kwon Do contre les prisonniers, après un grand lavage de cerveau pour qu'il considère les prisonniers comme l'incarnation du «Mal».
L'université comme récompense pour avoir tué les prisonniers-fuyards
«Nous étions encouragés à tuer ceux qui essayaient de s'échapper, explique-t-il.Nous avions le droit de les tuer et si nous ramenions le corps, nous pouvions être récompensés par l'envoi à l'université», explique-t-il, affirmant que certains gardes faisaient exprès de faire sortir des prisonniers du camp pour les tuer et obtenir cette récompense.
Ahn, qui admet avoir participé aux violences mais pense n'avoir jamais tué, a été promu chauffeur, ce qui lui permet alors de voir de nombreux prisonniers et de découvrir que certains étaient là depuis l'âge de 2 ou 4 ans, que d'autres étaient nés dans les camps. «0% d'entre eux ne savaient pourquoi ils étaient là.»«J'avais été entraîné à repérer les mensonges, en observant les mouvements des yeux, des lèvres (...) mais ils avaient bien trop peur d'être punis s'ils ne disaient pas la vérité», assure-t-il.
En 1994, en retournant chez lui pendant une permission il découvre que son père, un jour d'ivresse, a critiqué les dirigeants, et a préféré ensuite se suicider. Sa mère, sa sœur et son frère sont arrêtés, il n'aura plus jamais de nouvelles d'eux.
« Il faut parler au présent, ces horreurs continuent»
La Commission d'enquête de l'ONU a souligné que les familles de personnes jugées hostiles étaient systèmatiquement envoyées dans les camps. Craignant pour son sort, Ahn profite de son camion pour se rendre à la frontière chinoise et traverser à la nage la rivière Du Man. Installé en Corée du sud, il travaillera dans une banque avant de choisir il y a trois ans de rejoindre l'ONG «Libérez le goulag nord-coréen». «Quand on parle de goulag, avec la Corée du nord, il faut parler au présent, ces horreurs continuent», souligne-t-il, affirmant qu'avec le dirigeant actuel Kim Jon-un «la population est tétanisée par la peur». Et Kim Jong-Un, aurait entre autres ordonné en janvier dernier que son oncle, Jang Song-Thaek, 67 ans, soit dévoré par une horde de chiens affamés.
La Commission de l'ONU a établi que le nombre de camps et de prisonniers a diminué suite aux décès et à quelques libérations mais elle estime que «80 000 à 120 000 prisonniers politiques sont actuellement détenus dans quatre grands camps prisons».
Source
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« Neuro-Pirates. Neuro-Esclaves » : Première conférence sur l'ingénierie sociale
Scriptoblog / Le Retour aux Sources et l’Agence Info Libre vous convient à la première conférence sur l’ingénierie sociale.
Rendez-vous le jeudi 13 mars 2014
à 19h45 à l’ASIEM,
6 rue Albert de Lapparent, salle Guyot.
Métro Ségur ligne 10 ou Sèvres-Lecourbe ligne 6.
Entrée : 5 euros
Inscription et renseignements : scriptoblog@gmail.com
La désinformation est un procédé devenu systématique. La manipulation, auparavant un art, est devenue une science grâce aux avancées dans les domaines de la connaissance (sociologie, psychologie sociale, neurosciences, cognivitisme) et de la technologie (ondes radio, électro-acoustique, chimique, informatique, cybernétique). L’ingénierie sociale, « modification planifiée du comportement humain » (Lucien Cerise), se veut alors la méthode ultime de destruction des mécanismes de cohésion sociale des civilisations. Guerre aux cerveaux, elle se veut une guerre à la vie.
Lucien Cerise, auteur de Photographies d’un hamburger, Gouverner par le chaos et Oliganarchy, décryptera en profondeur l’action et la portée de la guerre cognitive de ces neuro-pirates.
Paolo Cioni, co-auteur de Neuro-Esclaves. Techniques et psychopathologies de la manipulation politique, économique et religieuse, ouvrage unique en son genre, neuropsychiatre, professeur de psychopathologie, enseignant à l’Ecole de spécialisation en psychiatrie de Florence, viendra pour la première fois en France donner cette conférence et y exposera les mécanismes du fonctionnement de notre cerveau (neuraux et cognitifs) et les techniques toujours plus perfectionnées employées pour nous manipuler à notre insu.
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Crève Tambour - Plan Social
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Souviens-toi du Derry !
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Artistiquement correct
Les jugements esthétiques et artistiques sont aussi soumis à la tyrannie du politiquement correct : toute personne qui ne partage pas le goût de l’art « moderne » officiel est cataloguée dans la catégorie des obscurantistes et des réactionnaires. Le terrorisme artistique règne ainsi sur les pouvoirs publics qui sont sommés, au nom de la culture, de favoriser et de financer uniquement l’art déraciné marchand. L’artistiquement correct a ainsi réussi à imposer en Occident ses rites et ses codes : déconstruction du corps humain, promotion narcissique de l’artiste, refus de la figuration, préférence pour l’abstraction géométrique et la mécanique, mise en avant des déviances comportementales, notamment.
Polémia, Cinq cents mots pour la dissidence
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Délinquance : les chiffres ont été manipulés pendant des années
Un rapport secret, dont Europe 1 a pu consulter des extraits, dénonce des années de mauvaises pratiques sur les statistiques de la Préfecture de Police de Paris.
C’est un rapport accablant qui a été remis en février dernier à Manuel Valls. Dans ce document, dont Europe 1 a pu consulter des extraits, l’Inspection générale de l’administration (IGA) et l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) détaillent comment les chiffres de la délinquance ont été manipulés pendant des années au sein de la Préfecture de Police de Paris (PP). Une pratique qui a perduré l’année dernière encore, malgré le changement de Préfet et les consignes de transparence du nouveau ministre de l’Intérieur.
Le rapport dénonce ainsi des pratiques "volontaires, massives et organisées" dans le but, écrivent les auteurs, "de réduire l’apparence de la gravité de la délinquance, en 'dégonflant' artificiellement la réalité des statistiques". Comment en est-on arrivé là ?
Comment maquille-t-on de tels chiffres ? Le rapport conjoint l'IGA et de l'IGPN fait état de trois méthodes permettant de truquer les données.
- Méthode numéro une :les policiers font carrément disparaître des faits de la base de données. Ils ne sont donc jamais comptabilisés. Une telle pratique concernerait, selon le rapport, plus de 16.000 faits non consignés en 2011 et plus de 13.000 en 2012.
- Méthode numéro deux :les policiers arrêtent de compter avant la fin du mois, quand ils ont atteint les objectifs fixés à l’avance. Ensuite, tout ce qui survient après le 23 ou le 25 du mois est reporté sur le mois suivant. A l'été 2012, quand la nouvelle équipe de la PP prend ses fonctions, elle découvre un "stock" de 5.000 faits non comptabilisés sur le premier semestre de l'année.
- Méthode numéro trois :la qualification des faits est tout simplement changée. Ainsi, par exemple, une tentative de cambriolage avérée est comptabilisée comme une simple "dégradation" de porte.
Comment justifie-t-on ces pratiques ? Ces pratiques semblent exister depuis une dizaine d’années, avec une accélération en 2008, souligne le rapport. A titre d’exemple, les responsables de deux arrondissements parisiens ont expliqué aux rapporteurs qu’ils enregistrent toutes les tentatives de cambriolage en simples dégradations, "pour ne pas faire exploser les chiffres", reconnaît ouvertement l’un d’eux. En banlieue parisienne, un commissaire explique lui aussi qu’il classe en "dégradations" toutes les tentatives de cambriolages lorsqu’il n’y a pas de préjudice, selon lui, dans ce cas, "les magistrats ne poursuivent pas, alors pourquoi se tirer une balle dans le pied ?".
Pourquoi ont-elles survécu à l'alternance politique ? Tellement encrées dans les habitudes depuis l’instauration de la "politique du chiffre" par Nicolas Sarkozy, ces mauvaises pratiques policières ont perduré même après l’arrivée du nouveau préfet de police Bernard Boucault. Malgré ses consignes et celles de Manuel Valls, par endroits, certains commissaires parisiens ont continué leurs vieilles pratiques au moins jusqu’à l’été dernier, d’après le rapport. Ainsi, les inspecteurs de l’IGA et l’IGPN ont découvert que plusieurs affaires de cambriolages en juin 2013 ont été enregistrées dans les statistiques en simples "dégradations", malgré des préjudices de plusieurs milliers d’euros.
Un recul relevé sur un an. Selon le rapport, ces mauvaises pratiques ont reculé entre juin 2012 et juin 2013. Sollicité par Europe 1, un haut fonctionnaire en poste à la Préfecture de Police assure qu'"il n’y a plus de reports de faits d’un mois sur l’autre". Il ajoute que des efforts sont en cours pour finir de mettre un terme aux autres pratiques dans tous les services. Par ailleurs, d’ici fin avril, tous les commissariats parisiens seront équipés du nouveau logiciel de rédaction des procédures (LRPPN V3), qui enregistre automatiquement les plaintes dans les statistiques, rendant impossible toute intervention de la hiérarchie policière dans les chiffres.
C’est un rapport accablant qui a été remis en février dernier à Manuel Valls. Dans ce document, dont Europe 1 a pu consulter des extraits, l’Inspection générale de l’administration (IGA) et l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) détaillent comment les chiffres de la délinquance ont été manipulés pendant des années au sein de la Préfecture de Police de Paris (PP). Une pratique qui a perduré l’année dernière encore, malgré le changement de Préfet et les consignes de transparence du nouveau ministre de l’Intérieur.
Le rapport dénonce ainsi des pratiques "volontaires, massives et organisées" dans le but, écrivent les auteurs, "de réduire l’apparence de la gravité de la délinquance, en 'dégonflant' artificiellement la réalité des statistiques". Comment en est-on arrivé là ?
Comment maquille-t-on de tels chiffres ? Le rapport conjoint l'IGA et de l'IGPN fait état de trois méthodes permettant de truquer les données.
- Méthode numéro une :les policiers font carrément disparaître des faits de la base de données. Ils ne sont donc jamais comptabilisés. Une telle pratique concernerait, selon le rapport, plus de 16.000 faits non consignés en 2011 et plus de 13.000 en 2012.
- Méthode numéro deux :les policiers arrêtent de compter avant la fin du mois, quand ils ont atteint les objectifs fixés à l’avance. Ensuite, tout ce qui survient après le 23 ou le 25 du mois est reporté sur le mois suivant. A l'été 2012, quand la nouvelle équipe de la PP prend ses fonctions, elle découvre un "stock" de 5.000 faits non comptabilisés sur le premier semestre de l'année.
- Méthode numéro trois :la qualification des faits est tout simplement changée. Ainsi, par exemple, une tentative de cambriolage avérée est comptabilisée comme une simple "dégradation" de porte.
Comment justifie-t-on ces pratiques ? Ces pratiques semblent exister depuis une dizaine d’années, avec une accélération en 2008, souligne le rapport. A titre d’exemple, les responsables de deux arrondissements parisiens ont expliqué aux rapporteurs qu’ils enregistrent toutes les tentatives de cambriolage en simples dégradations, "pour ne pas faire exploser les chiffres", reconnaît ouvertement l’un d’eux. En banlieue parisienne, un commissaire explique lui aussi qu’il classe en "dégradations" toutes les tentatives de cambriolages lorsqu’il n’y a pas de préjudice, selon lui, dans ce cas, "les magistrats ne poursuivent pas, alors pourquoi se tirer une balle dans le pied ?".
Pourquoi ont-elles survécu à l'alternance politique ? Tellement encrées dans les habitudes depuis l’instauration de la "politique du chiffre" par Nicolas Sarkozy, ces mauvaises pratiques policières ont perduré même après l’arrivée du nouveau préfet de police Bernard Boucault. Malgré ses consignes et celles de Manuel Valls, par endroits, certains commissaires parisiens ont continué leurs vieilles pratiques au moins jusqu’à l’été dernier, d’après le rapport. Ainsi, les inspecteurs de l’IGA et l’IGPN ont découvert que plusieurs affaires de cambriolages en juin 2013 ont été enregistrées dans les statistiques en simples "dégradations", malgré des préjudices de plusieurs milliers d’euros.
Un recul relevé sur un an. Selon le rapport, ces mauvaises pratiques ont reculé entre juin 2012 et juin 2013. Sollicité par Europe 1, un haut fonctionnaire en poste à la Préfecture de Police assure qu'"il n’y a plus de reports de faits d’un mois sur l’autre". Il ajoute que des efforts sont en cours pour finir de mettre un terme aux autres pratiques dans tous les services. Par ailleurs, d’ici fin avril, tous les commissariats parisiens seront équipés du nouveau logiciel de rédaction des procédures (LRPPN V3), qui enregistre automatiquement les plaintes dans les statistiques, rendant impossible toute intervention de la hiérarchie policière dans les chiffres.
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"Contre l'idéologie du même" : rencontre avec Alain de Benoist
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Pédophilie : démission d'un proche de Cameron
Un proche conseiller du Premier ministre britannique David Cameron a démissionné à la suite de son arrestation pour détention d'images à caractère pédophile.
Patrick Rock, 62 ans, avait été arrêté à son domicile le 13 février par des policiers de l'agence nationale de la criminalité (NCA), avertie la veille par les services de Downing Street. "Le Premier ministre avait aussitôt été informé puis tenu au courant tout au long" de l'affaire, a précisé un porte-parole de David Cameron.
"Une enquête est en cours et ce ne serait pas approprié de la commenter, mais le Premier ministre estime que la possession d'images à caractère pédophile est abjecte et que toute personne impliquée dans ça doit tomber sous le coup de la loi", indique un communiqué.
Source
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Foo Fighters - Come Alive
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Defend Bangkok !
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La première règle du Fight Club est...
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Quand la police demandait à une jeune Russe d'espionner la Manif pour tous
C'est une brillante jeune fille, en tête de sa classe en hypokhâgne.
Anna, née à Saint-Pétersbourg il y a bientôt 19 ans, aimerait bien pouvoir se concentrer sur ses examens. Mais alors que ses parents, immigrés en France et installés dans les Yvelines depuis 2004, ont obtenu leurs papiers assez facilement, l'étudiante attend toujours sa naturalisation française.
Et si l'on en croit les policiers qui lui ont fait subir, en septembre, un interrogatoire édifiant, elle n'aurait pas tout à fait le profil idéal.
Dans une longue lettre de motivation pour obtenir sa naturalisation, Anna indique qu'elle «(s')intéresse à la vie politique de (son) pays» et qu'elle a déjà participé à «un meeting» et à «des manifestations». Il n'en fallait pas plus pour qu'elle fasse l'objet d'une attention toute spécifique de la Sous-direction de l'information générale (SDIG, ex-RG) des Yvelines. «Vous être de droite, je présume!», attaque le policier dès l'entrée de la jeune fille dans son bureau du commissariat de Viroflay. «Ils m'ont même demandé si j'allais à la messe!», raconte la jeune orthodoxe. «Est-ce que vous êtes allée à la Manif pour tous? Et vos amis de prépa? Et ceux de votre ancien lycée versaillais?», mitraillent un major et son commandant.
Les policiers laissent planer la menace d'un «avis défavorable». «À moins que, pour montrer votre bonne foi, vous ne donniez des noms précis de gens qui participent à la Manif pour tous…, lâchent-ils. Et que vous n'alliez, jeudi 10 octobre prochain, aux Veilleurs, à Versailles…»
source
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Les francs-maçons à la manœuvre
Piqués au vif par certaines attaques, soucieux de défendre leurs amis et leurs idées, les francs-maçons repartent à l'offensive. De leurs réseaux élyséens à leurs fiefs ministériels, voici comment ils s'activent en coulisse, dans la campagne des municipales comme sur la laïcité et la fin de vie.
Cela a commencé en mars 2013 par la présence de quelques militants d'extrême droite agitant des drapeaux rue Cadet, devant le siège parisien du Grand Orient de France (GODF), la plus importante obédience maçonnique française, forte de 52.000 membres. L'opération s'est reproduite le 24 mai avec une manifestation plus démonstrative d'opposants à la franc-maçonnerie, tentant de bloquer les accès. Aucun dégât n'a été constaté, mais le grand maître d'alors, José Gulino, craignant de futurs débordements, s'est plaint auprès du ministère de l'Intérieur de l'absence de mesure de protection du bâtiment, dont les portes de verre donnent directement sur la rue.
Depuis, les incidents se sont multipliés. Aux cris de «Francs-maçons en prison! Dictature maçonnique», des activistes sont revenus en décembre rue Cadet huer la présence de la garde des Sceaux Christiane Taubira, accueillie comme conférencière dans le grand temple du GODF. Des «arbres de la laïcité» ont été arrachés à Angers, Bordeaux et dans deux villes de l'Essonne (Boussy-Saint-Antoine et Epinay-sous-Sénart) au nom d'un mouvement Combattre la franc-maçonnerie. Des tags antimaçonniques ont été peints à Toulouse et près des temples, comme à la mi-janvier devant la porte du temple de la rue Ségalier, à Bordeaux et début février, face au siège parisien du GODF. Lors de la manifestation Jour de colère, le dimanche 26 janvier, d'autres slogans anti-maçonniques ont été proférés.
Même s'il ne s'agit que d'actes marginaux, attribués à des groupuscules d'ultras, cette détérioration du climat politique inquiète les francs-maçons. «Ces résurgences du passé sont malsaines», estime Michel Meley, le président du Droit humain (DH), la grande obédience mixte française. «La parole extrémiste s'est désinhibée. L'antimaçonnisme se réveille. Il nous oblige à réagir», renchérit Catherine Jeannin-Naltet, la grande maîtresse de la Grande Loge féminine de France (GLFF), la première obédience féminine hexagonale.
L'antimaçonnisme semble se réveiller
Voilà donc les 150.000 francs-maçons français bousculés, et, pour la plupart, prêts à reprendre l'offensive. D'abord, pour défendre des «valeurs républicaines» qu'ils estiment aujourd'hui menacées. Et aussi pour jouer de leur influence, via leurs contacts et leurs réseaux, partout où ils le peuvent. «Gémissons, gémissons, mais agissons!» a lancé Marc Henry, le grand maître de la Grande Loge de France (GLDF), dans une vidéo postée en janvier sur YouTube après l'affaire Dieudonné. D'ordinaire très prudent et neutre politiquement, ce dignitaire s'est dit choqué par d'autres propos, tels ceux du maire UMP de Roquebrune-sur-Argens (Var) regrettant, en décembre, que les pompiers soient intervenus trop tôt pour circonscrire un incendie dans un camp de Roms. Marc Henry redoute que les futurs résultats des élections municipales et européennes ne soient pas «ceux de la démocratie à laquelle nous aspirons».
Signe de l'urgence, après une participation éparse à une manifestation contre le racisme fin novembre, les responsables des neuf principales obédiences françaises - à l'exception de la Grande Loge nationale française (GLNF), purement spiritualiste - se sont réunis discrètement le 3 janvier pour fédérer leurs positions, notamment sur l'antiracisme et la laïcité. «Vu la montée des extrêmes, nous voulons faire des propositions concrètes d'ici à la fin 2014», confie un des participants. L'heure du sursaut a sonné. Le temps des grandes manœuvres est arrivé.
Une multiplication d'obédiences dissidentes
N'en déplaise aux théoriciens du complot, la franc-maçonnerie française était, jusqu'à ces derniers mois, aussi divisée qu'assoupie. La GLNF, plutôt classée à droite, a connu, depuis 2009, une grave crise interne. Affichant ses dérives, elle a perdu environ la moitié de ses 43.000 membres, avant de retrouver un certain calme sous la houlette d'un nouveau grand maître, Jean-Pierre Servel. Des obédiences dissidentes se sont multipliées, morcelant encore davantage un paysage maçonnique déjà émietté. Au point de susciter le constat amer de trois anciens dignitaires : Alain Bauer, Michel Barat et Roger Dachez ont fustigé «la guerre des obédiences» dans un pamphlet paru cet automne et titré Les Promesses de l'aube (Dervy). «Tout a été déconstruit par la culture des ego et la pulsion du cordon plus large, plus doré, plus frangé», écrivaient-ils, regrettant aussi que «la richesse du débat» ait «virtuellement disparu» des loges, les obédiences produisant «une eau tiède au mieux, rien au pire».
La charge était rude, mais pas totalement infondée. Si les frères en maçonnerie savent étendre leurs réseaux dans un certain nombre de fiefs, au sein des ministères ou de grandes entreprises publiques, leur magistère intellectuel s'est dilué au fil du temps. «D'autres clubs et laboratoires d'idées sont apparus ces dernières années et nous concurrencent directement sur le terrain des idées, que ce soit sur la laïcité ou la liberté», explique ainsi un gradé du GODF, assez critique.
Le réveil récent des francs-maçons français s'est opéré en deux temps. En mai 2012, le GODF, traditionnellement orienté à gauche, a vu d'un bon œil la victoire de François Hollande et l'arrivée de frères au gouvernement, qu'il s'agisse de Manuel Valls, qui a fréquenté les loges durant huit ans, de Jean-Yves Le Drian, Victorin Lurel, Frédéric Cuvillier ou Jérôme Cahuzac - ce dernier étant finalement suspendu du GODF après le mensonge avoué sur son compte bancaire à l'étranger. De plus, la charte de la laïcité et les projets d'enseignement de «morale laïque» mis en avant par le ministre de l'Education nationale Vincent Peillon, qui n'est pas initié, ont séduit les frères du GODF.
Une offensive liée à la détérioration du climat
Promu en septembre 2012 pour un court mandat d'un an, le grand maître José Gulino, un socialiste du Pas-de-Calais, ne cachait pas sa volonté de peser sur le gouvernement et le Parlement. Le GODF a aussi repris fin 2012 le contrôle de la Fraternelle parlementaire (Frapar), en faisant élire l'un des siens, le député socialiste du Nord Christian Bataille à la tête de cette amicale des francs-maçons de l'Assemblée nationale et du Sénat. Celle-ci compte plus de 400 membres, dont 150 élus, soit 15 % du total des parlementaires. Christian Bataille sait s'y prendre pour pousser ses pions : il a déjà présidé la Frapar et il professe une foi de charbonnier dans les valeurs maçonniques. Celles-ci le conduisent à se transformer en avocat de causes aussi controversées que la lutte contre les langues régionales, au nom du jacobinisme, et en faveur de l'exploration des gaz de schiste, au nom de la science.
Cette première offensive liée au retour de la gauche au pouvoir a produit quelques résultats, que ce soit pour promouvoir le mariage pour tous, défendre les réformes fiscales ou contrer la récupération du thème de la laïcité par l'extrême droite. Cependant, l'atmosphère politique s'est dégradée tout au long de l'année 2013. La crise économique a accentué les fractures. Les oppositions au gouvernement se sont cristallisées, via les cohortes de la Manif pour tous, l'émergence du Printemps français, la rébellion des Bonnets rouges, le ras-le-bol fiscal de petits patrons et les manifestations pour défendre la famille. La radicalisation de certains groupes, attisée par la fermeté des autorités, a provoqué des dérapages.
Christiane Taubira est devenue une icône
Les francs-maçons font partie des cibles, ainsi que les ministres dont ils se sentent proches. Les insultes racistes à l'encontre de Christiane Taubira ont, par exemple, suscité une vague de soutien. «Assez, c'est assez! Nous ne pouvons plus taire notre inquiétude face à l'augmentation et à la banalisation de propos racistes», a protesté la GLFF mi-novembre. La garde des Sceaux a été invitée à plancher le 17 décembre au siège du GODF sur le thème «Crise des valeurs de la République: analyse et perspectives». Devant une salle conquise, la ministre de la Justice, qui n'est pas initiée, a exposé ses vues. «Depuis, elle est considérée comme une véritable icône, courageuse et carrément intouchable», s'amuse un des frères présents ce soir-là. «Elle est en phase avec nous, et nous avec elle», ajoute Philippe Guglielmi, ancien grand maître, patron de la fédération du PS de Seine-Saint-Denis, proche de Claude Bartolone. Prolongeant le discours de Christiane Taubira, l'actuel grand maître du GODF, Daniel Keller, un énarque chef d'entreprise de 54 ans, a appelé ses 1 200 loges à débattre de manière active sur cette «crise des valeurs» dans le but de transmettre au plus tôt les conclusions de leurs travaux aux pouvoirs publics. «Il a décidé de remettre les loges au travail. C'est une très bonne chose», se réjouit Gérard Contremoulin, un vétéran du GODF, très engagé à gauche.
Signe de sa proximité avec la majorité, le Cercle Ramadier, qui réunit quelque 1 200 élus francs-maçons de gauche, sous la houlette de l'ancien ministre socialiste Jean Le Garrec, a de son côté organisé le 18 novembre un colloque avec les grands maîtres de quatre obédiences maçonniques au sein même des locaux de l'Assemblée nationale. Thème de la soirée : «Comment combattre les extrêmes droites ?» Ce sujet a été décliné dans les antennes régionales du Cercle Ramadier, notamment en Provence-Alpes-Côte-d'Azur fin novembre, en présence de Loïc Gachon, maire socialiste de Vitrolles.
Il est vrai que la campagne des municipales renforce l'inquiétude des édiles locaux et des frères. Du coup, les francs-maçons se positionnent, de Paris à Marseille pour soutenir les candidats «républicains» qui leur conviennent. L'appui des réseaux maçonniques est ainsi acquis à quelques frères élus, bien implantés localement, de François Rebsamen, à Dijon, à Gérard Collomb, à Lyon. Mais ailleurs, nul ne peut prédire qui, du côté de l'UMP, du centre ou du PS, voire des Verts ou du Front de gauche, va réellement bénéficier de cet activisme maçonnique.
Un grand maître reçu jusqu'à l'Elysée
De manière plus officielle, Daniel Keller a profité de son intronisation comme grand maître du GODF, début septembre, pour être reçu au plus haut niveau dans les palais de la République. Réputé de gauche, sans être encarté au PS comme nombre de ses prédécesseurs, Daniel Keller joue la carte du renouveau. «N'étant guère connu, il était normal qu'il aille se présenter, explique un de ses amis. Il leur dit simplement ce qu'il pense, et qu'il n'a aucune envie d'être une courroie de transmission du pouvoir de gauche.» Il n'empêche. Le tapis rouge a été déroulé au patron de l'obédience la plus engagée sur le terrain sociétal et politique. Claude Bartolone, président de l'Assemblée nationale, très à l'aise dans les milieux maçonniques, a invité Daniel Keller dans son hôtel de Lassay, et le maire de Paris, Bertrand Delanoë, qui fut naguère initié, a fait de même en son hôtel de ville. Manuel Valls a ensuite convié à déjeuner une brochette de grands maîtres, dont celui du GODF, place Beauvau, le 28 novembre. Selon L'Express, le rendez-vous a été concocté avec l'appui direct d'Alain Bauer, ancien grand maître du GODF, ex-conseiller officieux de Nicolas Sarkozy et ami de longue date de Manuel Valls. Au menu de ce déjeuner : laïcité, immigration, prisons, sécurité.
Critiqué par certains frères de gauche pour sa politique d'expulsion des Roms, le ministre de l'Intérieur s'est expliqué sans détour. Il a, depuis lors, vu sa cote remonter dans les loges grâce à sa position dans l'affaire Dieudonné. «J'étais en phase avec la circulaire de Valls interdisant ses spectacles, et sa validation par le Conseil d'Etat. Il y a un moment où il faut sanctionner fermement les propos antisémites», martèle Daniel Keller. Le ministre de l'Intérieur a même consacré, le 30 janvier, une séance spéciale de vœux aux obédiences.
La première obédience veut faire des propositions moins timorées
Daniel Keller a aussi été reçu successivement à l'Elysée par François Hollande, le 5 décembre, et à Matignon par Jean-Marc Ayrault, le 20 décembre. Deux honneurs auxquels peu de dignitaires religieux ont eu droit, pas même ses derniers prédécesseurs au GODF. Au-delà des courtoisies, ce retour en grâce marque un souhait de soutien mutuel entre le pouvoir actuel et les francs-maçons les plus militants. «Nous partageons des préoccupations communes sur la crise, qui a déboussolé les valeurs de la République, confie Daniel Keller. A nous de faire des suggestions pour les renouveler de manière moins timorée, en cessant de nous cacher derrière notre petit doigt.»
La reconquête s'organise sur plusieurs fronts. Le GODF veut, par exemple, souffler aux responsables politiques des idées concrètes sur la citoyenneté européenne, afin de renouer avec l'idéal des pères de l'Europe. Daniel Keller en a parlé longuement avec François Hollande lors de leur entrevue. Les 14 000 sœurs de la GLFF sont, de leur côté, très remontées pour protéger la loi sur l'avortement, récemment amendée, au grand dam de certains milieux catholiques. «S'il le faut, nous irons encore manifester pour défendre les droits des femmes», explique Catherine Jeannin-Naltet. Les obédiences les plus «libérales» sont également prêtes à se mobiliser sur la future loi sur la «fin de vie», dont le président de la République a parlé lors de sa conférence de presse du 14 janvier. C'est un des engagements les plus anciens des francs-maçons. Ils sont bien décidés à faire valoir leurs idées, mûries ces derniers mois, en faveur d'une euthanasie maîtrisée.
Mais leur bataille principale reste celle de la laïcité. Le GODF réclame toujours la constitutionnalisation de la loi de 1905 sur la séparation des Eglises et de l'Etat. Promise par le candidat François Hollande lors de sa venue rue Cadet, en novembre 2011, cette sanctuarisation n'est guère d'actualité. Si le pouvoir exécutif mettait ce changement constitutionnel à l'ordre du jour, il manquerait une majorité des trois cinquièmes des deux chambres du Parlement réunies en Congrèspour l'adopter. De plus, le texte devrait préserver l'exception concordataire des départements de l'est de la France, ce qui contrarierait in fine bon nombre de francs-maçons. Un nœud gordien difficile à trancher.
En réalité, le GODF semble avoir compris mezzo voce qu'il ne fallait rien espérer de concret dans ce domaine avant longtemps. A défaut, plusieurs représentants d'obédiences ont été auditionnés en décembre par le sénateur centriste de l'Eure Hervé Maurey, en charge d'un rapport sur le financement des lieux de culte par les collectivités locales. «Nous avons répété qu'il ne pouvait y avoir d'argent public dans ce domaine», précise Michel Meley. La question des financements indirects des mosquées, via des prêts quasi gracieux de terrains consentis par les villes, fait toujours grincer des dents chez les frères. Et elle constitue, avec le Front national en embuscade sur le sujet, une source de possibles polémiques à la veille des municipales…
Contre une modification de la loi prohibant les signes religieux ostentatoire à l'école
Pour les francs-maçons, le combat en faveur de la laïcité ne s'arrête pas là. La récente publication par les services du Premier ministre d'un rapport d'experts évoquant la possibilité d'une autorisation du port du voile à l'école a remis le feu aux poudres. Plusieurs dignitaires francs-maçons sont immédiatement montés au créneau pour dire à Matignon et à l'Elysée qu'il ne fallait pas modifier la loi de 2004 prohibant les signes religieux ostentatoires à l'école. «Jean-Marc Ayrault m'a rassuré sur ce point, me confirmant qu'il ne toucherait pas à cette loi», explique Daniel Keller. En revanche, les décisions contradictoires des tribunaux administratifs sur l'affaire dite de la crèche Baby-Loup, annulant puis validant le licenciement d'une employée portant le voile, suscite le souhait d'une intervention du législateur. Et le flou juridique entourant le voile porté par des parents accompagnateurs lors de sorties scolaires renforce cette nécessité aux yeux de certains frères.
Ancien grand maître du GODF, Jean-Michel Quillardet, défenseur des grands principes laïcs au sein de son Observatoire international de la laïcité contre les dérives communautaires, est de ceux-là: «Il faudrait qu'une nouvelle loi étende l'interdiction de port de signes religieux ostentatoires de 2004 aux établissements de la petite enfance exerçant un service public et aux accompagnants», plaide cet avocat. Cela permettrait, selon lui, d'éviter d'autres contentieux Baby-Loup. «Je crains que la gauche soit trop frileuse en matière de défense de la laïcité. Il faudra tenir bon», renchérit Daniel Keller.
Le GODF peut compter sur ses amis de la Fraternelle parlementaire, présidée par Christian Bataille. «À titre personnel, je pense que nous devrions légiférer sur la laïcité à l'école», avance pour sa part le député du Nord. Mais ce dernier n'ignore pas que certains de ses collègues socialistes, plus sensibles aux sirènes communautaristes, hésiteront à franchir le pas. Et il devra composer avec les différentes sensibilités maçonniques représentées au sein de sa fraternelle, qui ne sont pas toutes sur la ligne laïque «pure et dure» du GODF.
Des francs-maçons ont créé un think tank
Réunir des frères sur des positions communes, en vue de peser dans les prochaines bagarres législatives, n'est, en effet, pas une mince affaire. Outre les rencontres régulières des grands maîtres des principales obédiences et le rôle actif de certaines fraternelles, d'autres cénacles s'y emploient. Et les initiatives en ce sens fleurissent depuis quelques mois. Regroupant près de 2000 maçons de tous horizons, le club Dialogue & Démocratie française (D & DF), initié par Pierre Chastanier, un médecin retraité, et Patrice Hernu, fils de l'ancien ministre socialiste de la Défense, continue par exemple de solliciter des personnalités politiques. «Nous avons notamment alerté les parlementaires sur le ras-le-bol fiscal et nous avons fait des propositions sur la fiscalité et la réorganisation des collectivités territoriales», explique Marc Fraysse, le nouveau président de D & DF, un ancien député gaulliste de Lyon, membre de la Grande Loge de France. Dernier invité en date du club, début février: Jean-Louis Debré, le président du Conseil constitutionnel. Bernard Cazeneuve, ministre en charge du Budget, et Manuel Valls, ministre de l'Intérieur, sont également attendus. Soucieux d'élargir leur cercle d'influence, le tandem des fondateurs de DDF a aussi créé une curieuse confrérie élitiste multi-obédientielle, appelée CIU, destinée à nouer un dialogue discret avec des personnalités religieuses.
Enfin, des anciens dirigeants de la Grande Loge de France (GLDF) et de quatre autres obédiences ont créé en mars 2013 ce qu'ils appellent «le premier think tank maçonnique», intitulé Franc-maçonnerie & société (FM & S). Objectif : fournir des idées neuves aux décideurs. En combattant les solutions extrémistes. «Du fait de leur caractère institutionnel, les obédiences sont un peu frileuses pour élaborer des propositions. En réunissant des maçons de plusieurs sensibilités, nous sommes plus libres de le faire. Et nous n'avons pas honte de nous montrer au grand jour», explique Jean-Michel Dardour, le président de FM & S, ancien grand maître adjoint de la GLDF.
Le think tank compte déjà quelque 400 membres, dont une majorité de maçons. Mais aussi des personnalités de la société civile, qui ne sont pas toutes initiées, comme le journaliste Alexandre Adler, le théologien Claude Geffré, l'essayiste Jean-Claude Guillebaud, le président d'honneur du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) Richard Prasquier, ou le scientifique Joël de Rosnay. Le premier sujet traité - éthique et médias - a donné lieu à d'intenses échanges avec des «profanes», journalistes et professionnels de la communication. Les suggestions du think tank, notamment sur la création d'une haute autorité de déontologie ou sur l'éducation des jeunes aux médias, ont été présentées à David Kessler, conseiller culture et communication de François Hollande. «Nous les avons envoyées également à tous les parlementaires, avec un très bon accueil», constate Bernard Ollagnier, un des animateurs de ce réseau. Le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) a rebondi quelques mois plus tard en ouvrant un site web sur l'éducation aux médias. En 2014, le think tank a décidé de plancher sur l'éthique économique et, lui aussi, sur la laïcité. Avec la volonté de rédiger au plus vite un «guide pratique du vivre ensemble» destiné aux élus, parlementaires, enseignants et parents. Les frères espèrent bien réimposer leurs vues!
Depuis, les incidents se sont multipliés. Aux cris de «Francs-maçons en prison! Dictature maçonnique», des activistes sont revenus en décembre rue Cadet huer la présence de la garde des Sceaux Christiane Taubira, accueillie comme conférencière dans le grand temple du GODF. Des «arbres de la laïcité» ont été arrachés à Angers, Bordeaux et dans deux villes de l'Essonne (Boussy-Saint-Antoine et Epinay-sous-Sénart) au nom d'un mouvement Combattre la franc-maçonnerie. Des tags antimaçonniques ont été peints à Toulouse et près des temples, comme à la mi-janvier devant la porte du temple de la rue Ségalier, à Bordeaux et début février, face au siège parisien du GODF. Lors de la manifestation Jour de colère, le dimanche 26 janvier, d'autres slogans anti-maçonniques ont été proférés.
Même s'il ne s'agit que d'actes marginaux, attribués à des groupuscules d'ultras, cette détérioration du climat politique inquiète les francs-maçons. «Ces résurgences du passé sont malsaines», estime Michel Meley, le président du Droit humain (DH), la grande obédience mixte française. «La parole extrémiste s'est désinhibée. L'antimaçonnisme se réveille. Il nous oblige à réagir», renchérit Catherine Jeannin-Naltet, la grande maîtresse de la Grande Loge féminine de France (GLFF), la première obédience féminine hexagonale.
L'antimaçonnisme semble se réveiller
Voilà donc les 150.000 francs-maçons français bousculés, et, pour la plupart, prêts à reprendre l'offensive. D'abord, pour défendre des «valeurs républicaines» qu'ils estiment aujourd'hui menacées. Et aussi pour jouer de leur influence, via leurs contacts et leurs réseaux, partout où ils le peuvent. «Gémissons, gémissons, mais agissons!» a lancé Marc Henry, le grand maître de la Grande Loge de France (GLDF), dans une vidéo postée en janvier sur YouTube après l'affaire Dieudonné. D'ordinaire très prudent et neutre politiquement, ce dignitaire s'est dit choqué par d'autres propos, tels ceux du maire UMP de Roquebrune-sur-Argens (Var) regrettant, en décembre, que les pompiers soient intervenus trop tôt pour circonscrire un incendie dans un camp de Roms. Marc Henry redoute que les futurs résultats des élections municipales et européennes ne soient pas «ceux de la démocratie à laquelle nous aspirons».
Signe de l'urgence, après une participation éparse à une manifestation contre le racisme fin novembre, les responsables des neuf principales obédiences françaises - à l'exception de la Grande Loge nationale française (GLNF), purement spiritualiste - se sont réunis discrètement le 3 janvier pour fédérer leurs positions, notamment sur l'antiracisme et la laïcité. «Vu la montée des extrêmes, nous voulons faire des propositions concrètes d'ici à la fin 2014», confie un des participants. L'heure du sursaut a sonné. Le temps des grandes manœuvres est arrivé.
Une multiplication d'obédiences dissidentes
N'en déplaise aux théoriciens du complot, la franc-maçonnerie française était, jusqu'à ces derniers mois, aussi divisée qu'assoupie. La GLNF, plutôt classée à droite, a connu, depuis 2009, une grave crise interne. Affichant ses dérives, elle a perdu environ la moitié de ses 43.000 membres, avant de retrouver un certain calme sous la houlette d'un nouveau grand maître, Jean-Pierre Servel. Des obédiences dissidentes se sont multipliées, morcelant encore davantage un paysage maçonnique déjà émietté. Au point de susciter le constat amer de trois anciens dignitaires : Alain Bauer, Michel Barat et Roger Dachez ont fustigé «la guerre des obédiences» dans un pamphlet paru cet automne et titré Les Promesses de l'aube (Dervy). «Tout a été déconstruit par la culture des ego et la pulsion du cordon plus large, plus doré, plus frangé», écrivaient-ils, regrettant aussi que «la richesse du débat» ait «virtuellement disparu» des loges, les obédiences produisant «une eau tiède au mieux, rien au pire».
La charge était rude, mais pas totalement infondée. Si les frères en maçonnerie savent étendre leurs réseaux dans un certain nombre de fiefs, au sein des ministères ou de grandes entreprises publiques, leur magistère intellectuel s'est dilué au fil du temps. «D'autres clubs et laboratoires d'idées sont apparus ces dernières années et nous concurrencent directement sur le terrain des idées, que ce soit sur la laïcité ou la liberté», explique ainsi un gradé du GODF, assez critique.
Le réveil récent des francs-maçons français s'est opéré en deux temps. En mai 2012, le GODF, traditionnellement orienté à gauche, a vu d'un bon œil la victoire de François Hollande et l'arrivée de frères au gouvernement, qu'il s'agisse de Manuel Valls, qui a fréquenté les loges durant huit ans, de Jean-Yves Le Drian, Victorin Lurel, Frédéric Cuvillier ou Jérôme Cahuzac - ce dernier étant finalement suspendu du GODF après le mensonge avoué sur son compte bancaire à l'étranger. De plus, la charte de la laïcité et les projets d'enseignement de «morale laïque» mis en avant par le ministre de l'Education nationale Vincent Peillon, qui n'est pas initié, ont séduit les frères du GODF.
Une offensive liée à la détérioration du climat
Promu en septembre 2012 pour un court mandat d'un an, le grand maître José Gulino, un socialiste du Pas-de-Calais, ne cachait pas sa volonté de peser sur le gouvernement et le Parlement. Le GODF a aussi repris fin 2012 le contrôle de la Fraternelle parlementaire (Frapar), en faisant élire l'un des siens, le député socialiste du Nord Christian Bataille à la tête de cette amicale des francs-maçons de l'Assemblée nationale et du Sénat. Celle-ci compte plus de 400 membres, dont 150 élus, soit 15 % du total des parlementaires. Christian Bataille sait s'y prendre pour pousser ses pions : il a déjà présidé la Frapar et il professe une foi de charbonnier dans les valeurs maçonniques. Celles-ci le conduisent à se transformer en avocat de causes aussi controversées que la lutte contre les langues régionales, au nom du jacobinisme, et en faveur de l'exploration des gaz de schiste, au nom de la science.
Cette première offensive liée au retour de la gauche au pouvoir a produit quelques résultats, que ce soit pour promouvoir le mariage pour tous, défendre les réformes fiscales ou contrer la récupération du thème de la laïcité par l'extrême droite. Cependant, l'atmosphère politique s'est dégradée tout au long de l'année 2013. La crise économique a accentué les fractures. Les oppositions au gouvernement se sont cristallisées, via les cohortes de la Manif pour tous, l'émergence du Printemps français, la rébellion des Bonnets rouges, le ras-le-bol fiscal de petits patrons et les manifestations pour défendre la famille. La radicalisation de certains groupes, attisée par la fermeté des autorités, a provoqué des dérapages.
Christiane Taubira est devenue une icône
Les francs-maçons font partie des cibles, ainsi que les ministres dont ils se sentent proches. Les insultes racistes à l'encontre de Christiane Taubira ont, par exemple, suscité une vague de soutien. «Assez, c'est assez! Nous ne pouvons plus taire notre inquiétude face à l'augmentation et à la banalisation de propos racistes», a protesté la GLFF mi-novembre. La garde des Sceaux a été invitée à plancher le 17 décembre au siège du GODF sur le thème «Crise des valeurs de la République: analyse et perspectives». Devant une salle conquise, la ministre de la Justice, qui n'est pas initiée, a exposé ses vues. «Depuis, elle est considérée comme une véritable icône, courageuse et carrément intouchable», s'amuse un des frères présents ce soir-là. «Elle est en phase avec nous, et nous avec elle», ajoute Philippe Guglielmi, ancien grand maître, patron de la fédération du PS de Seine-Saint-Denis, proche de Claude Bartolone. Prolongeant le discours de Christiane Taubira, l'actuel grand maître du GODF, Daniel Keller, un énarque chef d'entreprise de 54 ans, a appelé ses 1 200 loges à débattre de manière active sur cette «crise des valeurs» dans le but de transmettre au plus tôt les conclusions de leurs travaux aux pouvoirs publics. «Il a décidé de remettre les loges au travail. C'est une très bonne chose», se réjouit Gérard Contremoulin, un vétéran du GODF, très engagé à gauche.
Signe de sa proximité avec la majorité, le Cercle Ramadier, qui réunit quelque 1 200 élus francs-maçons de gauche, sous la houlette de l'ancien ministre socialiste Jean Le Garrec, a de son côté organisé le 18 novembre un colloque avec les grands maîtres de quatre obédiences maçonniques au sein même des locaux de l'Assemblée nationale. Thème de la soirée : «Comment combattre les extrêmes droites ?» Ce sujet a été décliné dans les antennes régionales du Cercle Ramadier, notamment en Provence-Alpes-Côte-d'Azur fin novembre, en présence de Loïc Gachon, maire socialiste de Vitrolles.
Il est vrai que la campagne des municipales renforce l'inquiétude des édiles locaux et des frères. Du coup, les francs-maçons se positionnent, de Paris à Marseille pour soutenir les candidats «républicains» qui leur conviennent. L'appui des réseaux maçonniques est ainsi acquis à quelques frères élus, bien implantés localement, de François Rebsamen, à Dijon, à Gérard Collomb, à Lyon. Mais ailleurs, nul ne peut prédire qui, du côté de l'UMP, du centre ou du PS, voire des Verts ou du Front de gauche, va réellement bénéficier de cet activisme maçonnique.
Un grand maître reçu jusqu'à l'Elysée
De manière plus officielle, Daniel Keller a profité de son intronisation comme grand maître du GODF, début septembre, pour être reçu au plus haut niveau dans les palais de la République. Réputé de gauche, sans être encarté au PS comme nombre de ses prédécesseurs, Daniel Keller joue la carte du renouveau. «N'étant guère connu, il était normal qu'il aille se présenter, explique un de ses amis. Il leur dit simplement ce qu'il pense, et qu'il n'a aucune envie d'être une courroie de transmission du pouvoir de gauche.» Il n'empêche. Le tapis rouge a été déroulé au patron de l'obédience la plus engagée sur le terrain sociétal et politique. Claude Bartolone, président de l'Assemblée nationale, très à l'aise dans les milieux maçonniques, a invité Daniel Keller dans son hôtel de Lassay, et le maire de Paris, Bertrand Delanoë, qui fut naguère initié, a fait de même en son hôtel de ville. Manuel Valls a ensuite convié à déjeuner une brochette de grands maîtres, dont celui du GODF, place Beauvau, le 28 novembre. Selon L'Express, le rendez-vous a été concocté avec l'appui direct d'Alain Bauer, ancien grand maître du GODF, ex-conseiller officieux de Nicolas Sarkozy et ami de longue date de Manuel Valls. Au menu de ce déjeuner : laïcité, immigration, prisons, sécurité.
Critiqué par certains frères de gauche pour sa politique d'expulsion des Roms, le ministre de l'Intérieur s'est expliqué sans détour. Il a, depuis lors, vu sa cote remonter dans les loges grâce à sa position dans l'affaire Dieudonné. «J'étais en phase avec la circulaire de Valls interdisant ses spectacles, et sa validation par le Conseil d'Etat. Il y a un moment où il faut sanctionner fermement les propos antisémites», martèle Daniel Keller. Le ministre de l'Intérieur a même consacré, le 30 janvier, une séance spéciale de vœux aux obédiences.
La première obédience veut faire des propositions moins timorées
Daniel Keller a aussi été reçu successivement à l'Elysée par François Hollande, le 5 décembre, et à Matignon par Jean-Marc Ayrault, le 20 décembre. Deux honneurs auxquels peu de dignitaires religieux ont eu droit, pas même ses derniers prédécesseurs au GODF. Au-delà des courtoisies, ce retour en grâce marque un souhait de soutien mutuel entre le pouvoir actuel et les francs-maçons les plus militants. «Nous partageons des préoccupations communes sur la crise, qui a déboussolé les valeurs de la République, confie Daniel Keller. A nous de faire des suggestions pour les renouveler de manière moins timorée, en cessant de nous cacher derrière notre petit doigt.»
La reconquête s'organise sur plusieurs fronts. Le GODF veut, par exemple, souffler aux responsables politiques des idées concrètes sur la citoyenneté européenne, afin de renouer avec l'idéal des pères de l'Europe. Daniel Keller en a parlé longuement avec François Hollande lors de leur entrevue. Les 14 000 sœurs de la GLFF sont, de leur côté, très remontées pour protéger la loi sur l'avortement, récemment amendée, au grand dam de certains milieux catholiques. «S'il le faut, nous irons encore manifester pour défendre les droits des femmes», explique Catherine Jeannin-Naltet. Les obédiences les plus «libérales» sont également prêtes à se mobiliser sur la future loi sur la «fin de vie», dont le président de la République a parlé lors de sa conférence de presse du 14 janvier. C'est un des engagements les plus anciens des francs-maçons. Ils sont bien décidés à faire valoir leurs idées, mûries ces derniers mois, en faveur d'une euthanasie maîtrisée.
Mais leur bataille principale reste celle de la laïcité. Le GODF réclame toujours la constitutionnalisation de la loi de 1905 sur la séparation des Eglises et de l'Etat. Promise par le candidat François Hollande lors de sa venue rue Cadet, en novembre 2011, cette sanctuarisation n'est guère d'actualité. Si le pouvoir exécutif mettait ce changement constitutionnel à l'ordre du jour, il manquerait une majorité des trois cinquièmes des deux chambres du Parlement réunies en Congrèspour l'adopter. De plus, le texte devrait préserver l'exception concordataire des départements de l'est de la France, ce qui contrarierait in fine bon nombre de francs-maçons. Un nœud gordien difficile à trancher.
En réalité, le GODF semble avoir compris mezzo voce qu'il ne fallait rien espérer de concret dans ce domaine avant longtemps. A défaut, plusieurs représentants d'obédiences ont été auditionnés en décembre par le sénateur centriste de l'Eure Hervé Maurey, en charge d'un rapport sur le financement des lieux de culte par les collectivités locales. «Nous avons répété qu'il ne pouvait y avoir d'argent public dans ce domaine», précise Michel Meley. La question des financements indirects des mosquées, via des prêts quasi gracieux de terrains consentis par les villes, fait toujours grincer des dents chez les frères. Et elle constitue, avec le Front national en embuscade sur le sujet, une source de possibles polémiques à la veille des municipales…
Contre une modification de la loi prohibant les signes religieux ostentatoire à l'école
Pour les francs-maçons, le combat en faveur de la laïcité ne s'arrête pas là. La récente publication par les services du Premier ministre d'un rapport d'experts évoquant la possibilité d'une autorisation du port du voile à l'école a remis le feu aux poudres. Plusieurs dignitaires francs-maçons sont immédiatement montés au créneau pour dire à Matignon et à l'Elysée qu'il ne fallait pas modifier la loi de 2004 prohibant les signes religieux ostentatoires à l'école. «Jean-Marc Ayrault m'a rassuré sur ce point, me confirmant qu'il ne toucherait pas à cette loi», explique Daniel Keller. En revanche, les décisions contradictoires des tribunaux administratifs sur l'affaire dite de la crèche Baby-Loup, annulant puis validant le licenciement d'une employée portant le voile, suscite le souhait d'une intervention du législateur. Et le flou juridique entourant le voile porté par des parents accompagnateurs lors de sorties scolaires renforce cette nécessité aux yeux de certains frères.
Ancien grand maître du GODF, Jean-Michel Quillardet, défenseur des grands principes laïcs au sein de son Observatoire international de la laïcité contre les dérives communautaires, est de ceux-là: «Il faudrait qu'une nouvelle loi étende l'interdiction de port de signes religieux ostentatoires de 2004 aux établissements de la petite enfance exerçant un service public et aux accompagnants», plaide cet avocat. Cela permettrait, selon lui, d'éviter d'autres contentieux Baby-Loup. «Je crains que la gauche soit trop frileuse en matière de défense de la laïcité. Il faudra tenir bon», renchérit Daniel Keller.
Le GODF peut compter sur ses amis de la Fraternelle parlementaire, présidée par Christian Bataille. «À titre personnel, je pense que nous devrions légiférer sur la laïcité à l'école», avance pour sa part le député du Nord. Mais ce dernier n'ignore pas que certains de ses collègues socialistes, plus sensibles aux sirènes communautaristes, hésiteront à franchir le pas. Et il devra composer avec les différentes sensibilités maçonniques représentées au sein de sa fraternelle, qui ne sont pas toutes sur la ligne laïque «pure et dure» du GODF.
Des francs-maçons ont créé un think tank
Réunir des frères sur des positions communes, en vue de peser dans les prochaines bagarres législatives, n'est, en effet, pas une mince affaire. Outre les rencontres régulières des grands maîtres des principales obédiences et le rôle actif de certaines fraternelles, d'autres cénacles s'y emploient. Et les initiatives en ce sens fleurissent depuis quelques mois. Regroupant près de 2000 maçons de tous horizons, le club Dialogue & Démocratie française (D & DF), initié par Pierre Chastanier, un médecin retraité, et Patrice Hernu, fils de l'ancien ministre socialiste de la Défense, continue par exemple de solliciter des personnalités politiques. «Nous avons notamment alerté les parlementaires sur le ras-le-bol fiscal et nous avons fait des propositions sur la fiscalité et la réorganisation des collectivités territoriales», explique Marc Fraysse, le nouveau président de D & DF, un ancien député gaulliste de Lyon, membre de la Grande Loge de France. Dernier invité en date du club, début février: Jean-Louis Debré, le président du Conseil constitutionnel. Bernard Cazeneuve, ministre en charge du Budget, et Manuel Valls, ministre de l'Intérieur, sont également attendus. Soucieux d'élargir leur cercle d'influence, le tandem des fondateurs de DDF a aussi créé une curieuse confrérie élitiste multi-obédientielle, appelée CIU, destinée à nouer un dialogue discret avec des personnalités religieuses.
Enfin, des anciens dirigeants de la Grande Loge de France (GLDF) et de quatre autres obédiences ont créé en mars 2013 ce qu'ils appellent «le premier think tank maçonnique», intitulé Franc-maçonnerie & société (FM & S). Objectif : fournir des idées neuves aux décideurs. En combattant les solutions extrémistes. «Du fait de leur caractère institutionnel, les obédiences sont un peu frileuses pour élaborer des propositions. En réunissant des maçons de plusieurs sensibilités, nous sommes plus libres de le faire. Et nous n'avons pas honte de nous montrer au grand jour», explique Jean-Michel Dardour, le président de FM & S, ancien grand maître adjoint de la GLDF.
Le think tank compte déjà quelque 400 membres, dont une majorité de maçons. Mais aussi des personnalités de la société civile, qui ne sont pas toutes initiées, comme le journaliste Alexandre Adler, le théologien Claude Geffré, l'essayiste Jean-Claude Guillebaud, le président d'honneur du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) Richard Prasquier, ou le scientifique Joël de Rosnay. Le premier sujet traité - éthique et médias - a donné lieu à d'intenses échanges avec des «profanes», journalistes et professionnels de la communication. Les suggestions du think tank, notamment sur la création d'une haute autorité de déontologie ou sur l'éducation des jeunes aux médias, ont été présentées à David Kessler, conseiller culture et communication de François Hollande. «Nous les avons envoyées également à tous les parlementaires, avec un très bon accueil», constate Bernard Ollagnier, un des animateurs de ce réseau. Le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) a rebondi quelques mois plus tard en ouvrant un site web sur l'éducation aux médias. En 2014, le think tank a décidé de plancher sur l'éthique économique et, lui aussi, sur la laïcité. Avec la volonté de rédiger au plus vite un «guide pratique du vivre ensemble» destiné aux élus, parlementaires, enseignants et parents. Les frères espèrent bien réimposer leurs vues!
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