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Le dessin censuré par le "Le monde"
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Faut pas pucer
En octobre dernier, une « transhumance urbaine » réunissant des éleveurs et leurs brebis a été organisée à Lyon pour protester contre le puçage électronique. Alors que les protestations bretonnes dits des « bonnets rouges » – qui défendent notamment l’agriculture productiviste au nom de l’emploi– font la une des médias, celles des petits éleveurs résistant depuis plusieurs années au puçage de leurs animaux sont largement passées sous silence. Ce mouvement est pourtant au cœur des mutations industrielles en cours, il mérite d’être soutenu et sorti de l’ombre.
A la suite des épizooties de fièvres aphteuses qui ont touché le nord de l’Europe en 2001, l’Union Européenne a engagé une vaste réforme de l’identification et de la traçabilité des ovins et des caprins, et imposé la généralisation des puces électroniques au nom de la « traçabilité », de la sécurité alimentaire et même, affirme-t-elle, de la protection de l’environnement. Depuis 2010-2011, l’identification des animaux domestiques et d’élevage est devenue obligatoire. Tous les chats nés après le 1er janvier 2012 doivent ainsi être tatoués ou – de plus en plus fréquemment – dotés d’une puce électronique (ou transpondeur) insérée sous la peau. La plupart des personnes n’ont sans doute pas entendu parler de cette mesure et ne se soucient guère de son application. Depuis le 1er juillet 2010, le puçage électronique des animaux d’élevage a également été rendu obligatoire pour toutes les nouvelles naissances d’ovins et de caprins. Cette mesure suscite, dans un silence assez général, l’opposition d’éleveurs qui veulent préserver leur existence et leur mode de vie.
L’électronisation, stade suprême de l’industrialisation
La généralisation du puçage des bêtes d’élevage à laquelle nous assistons couronne deux siècles de mutations et d’industrialisation de l’agriculture. Jusqu’au milieu du XIXe siècle, l’élevage était complètement intégré au travail paysan. Les animaux étaient les partenaires des hommes, ils appartenaient au même monde mental et affectif. Animaux et paysans habitaient les mêmes maisons, travaillaient ensemble et subissaient en grande partie une condition partagée face aux élites dominantes. Cette proximité est très bien montrée par les historiens qui s’intéressent de plus en plus l’évolution de la condition animale et qui montrent toute l’importance d’intégrer les bêtes dans l’histoire des sociétés humaines.
Au XIXe siècle, l’agriculture, et la nature dans son ensemble, sont progressivement apparues comme des réserves de profits laissées en friche par des paysans routiniers. L’élevage commence alors à se transformer, dans les représentations comme dans les faits, en « productions animales ». L’animal devient une « machine » au même titre qu’un haut fourneau ou une mécanique textile, une machine vivante dont il faut extraire le maximum en utilisant toutes les ressources de la science, en leur appliquant les méthodes d’organisation du travail du taylorisme et de la grande usine. La « zootechnie », qui naît à cette époque, a pour mission de faire de l’élevage une activité rentable pour les industriels et pour la nation, elle est une science nouvelle qui entend appliquer à « la production animale » les principes de « la science expérimentale ». L’animal est pensé comme machine productive au moment même où le culte des machines s’impose partout. La finalité doit être le rendement et les zootechniciens se considèrent comme les « ingénieurs des machines vivantes ». Les bêtes elles-mêmes changent physiquement : plus grandes, plus lourdes, plus productives : une vache moyenne pesait 300 kg au milieu du XIXe siècle contre 500 kg dans l’entre-deux-guerres, certaines races atteignent des records comme la Limousine qui passe de 300 à 900 kg.
Depuis 1945, le processus s’est considérablement accéléré. Comme les semences qui sont de plus en plus contrôlées – on interdit l’échange de celles qui n’ont pas reçu d’agrément – les animaux doivent être contrôlés, surveillés, agréés. De plus en plus, seuls les mâles conformes génétiquement doivent être employés pour la reproduction, et toutes les évolutions vont dans le même sens : la mise en place d’une filière très productive, rationalisée, fondée sur l’application des dernières méthodes scientifiques et des dernières technologies. L’Etat, l’Europe et les grands industriels du secteur font cause commune au nom de la défense de l’intérêt public pour les premiers, et de l’accroissement de leurs profits pour le second.
Résistances et protestations
Pourtant, de nombreux éleveurs dénoncent cette grande transformation en cours. En dépit de leur dispersion et de leur faible capacité à se faire entendre, les oppositions à cette électronisation et ses effets s’accroissent. Dans un bilan consacré à l’avancée de l’identification électronique rédigé en juillet 2013, les autorités estimaient qu’au 1er janvier 201 environ 75% des reproducteurs ovins et caprins portaient désormais « une boucle électronique ». Pourtant, seuls 13 833 exploitations avaient électronisé leurs troupeaux à 100%, soit 15% de l’ensemble des 93 387 exploitations recensées en France. Ce sont surtout les exploitations les plus grosses, les plus concentrées, qui ont franchi le pas. Dans ce secteur où domine la masse des petits troupeaux, la plupart des éleveurs repoussent en effet cette électronisation et dénoncent ses effets.
Le collectif « Faut pas pucer » notamment, qui milite contre la généralisation du puçage, appelait dès 2011 à un boycott de cette pratique. Alors que « l’identification électronique » se généralise peu à peu, la lutte des éleveurs – apparemment limitée ou sectorielle – acquiert la dimension d’un combat universel. En 2012, des groupes d’opposants se mettent en place et des rencontres ont lieu dans le Tarn, les Alpes-de-Haute-Provence ou en Ariège. Dans ces régions de montagne où subsiste un élevage à taille humaine, des éleveurs se réunissent et organisent des marches pacifiques et diverses actions de désobéissance.
En février 2012, « faut pas pucer » a ainsi organisé « une manifestation citoyenne » à Albi afin « de faire prendre conscience aux gens, et également aux fonctionnaires qui appliquent les directives, des conséquences d’une information forcenée telle qu’elle a lieu de nos jours ». En décembre 2012 une déclaration sur le « refus du puçage électronique des animaux d’élevage » est adoptée, des appels à la désobéissance sont lancés pour inviter les citoyens à soutenir les éleveurs qui s’opposeraient à la mesure. Un collectif d’éleveurs basques voit aussi le jour en avril 2013, alors que des protestations émergent dans les autres pays européens comme l’Allemagne. La confédération paysanne a réuni, en octobre 2013, 800 signatures d’éleveurs sur une pétition remise à la préfecture.
Au nom de l’hygiène et de la sécurité
Les raisons de s’opposer sont nombreuses. La généralisation de l’identification électronique des bêtes n’est pas une simple mesure neutre, qui irait dans le sens du progrès à travers l’application de l’informatique et de ses outils au service de l’amélioration de l’hygiène et de la sécurité. Il s’agit d’abord d’une mesure profondément politique en ce sens qu’elle transforme le monde, privilégie certains intérêts aux dépens d’autres. Elle favorise ainsi les industriels de la viande contre les petits éleveurs. Les entreprises d’abattage et les plus gros éleveurs ont d’ailleurs été les précurseurs et les principaux gagnants du puçage, et ils ont beaucoup investi dans l’identification électronique. La réglementation européenne accentue la crise du petit élevage au profit des plus gros, beaucoup d’agriculteurs semblent en effet préférer l’abandon de l’élevage d’appoint des petits ruminants plutôt que de courir le risque de perdre les primes octroyées à l’exploitation céréalière qui assurent la viabilité de leur entreprise. Le chantage aux subventions fonctionne ici à plein.
Les raisons de s’opposer à l’électronisation de l’élevage sont nombreuses. Cette réglementation entraîne ainsi un surcoût considérable – de l’ordre de 18 millions d’euros en France – difficile à supporter pour les petits éleveurs déjà en difficulté. L’opposition se fait aussi au nom de la lutte contre l’agriculture productiviste qui a déjà mille fois montré ses limites et dangers ; au nom de la défense des petits troupeaux qui jouent un rôle si important pour la préservation de la vie sociale des petites communes comme des paysages ruraux – pensons simplement à la façon dont les pâturages, en maintenant les milieux ouverts, favorisent la biodiversité et contribuent à limiter les risques d’incendie.
Pour beaucoup d’éleveurs, l’hostilité à l’informatisation tient aussi au refus de l’encadrement excessif et à la défense de leur dignité. « L’électronisation des brebis », n’a en effet aucune utilité pour les éleveurs car le puçage d’abord d’un souci d’optimisation du cheptel et de la main-d’œuvre humaine par les entreprises du secteur. Comme le montre notamment la sociologue Jocelyne Porcher dans son travail sur l’élevage, ici la technique n’est pas mise au service des intérêts de certains groupes industriels, dans la continuité des mutations qui ont affecté l’élevage depuis deux siècles. A travers cette mesure technique apparemment neutre, ce sont les liens d’affection et d’échange, qui caractérisaient la relation de l’éleveur et de ses bêtes, qui sont mis à mal au profit d’un processus d’industrialisation toujours plus poussé.
Les systèmes techniques visant à la traçabilité des bêtes, au nom de l’hygiène, de la sécurité alimentaire, voire de la protection de l’environnement, sont un exemple caricatural du gigantesque processus de technologisation en cours et des résistances qu’il suscite. Ici comme dans de nombreux autres secteurs, les outils électroniques tendent à faire des acteurs humains de purs gestionnaires, des techniciens réduits au rôle d’appendices du macro-système industriel. A cet égard, l’expérience des éleveurs et leur combat actuel a une valeur plus générale, elle témoigne de l’informatisation à marche forcée du monde, de ses mécanismes coercitifs, de la difficulté à s’y opposer alors qu’elle est présentée comme l’évolution naturelle vers une société plus sécurisée et mieux organisée.
A la suite des épizooties de fièvres aphteuses qui ont touché le nord de l’Europe en 2001, l’Union Européenne a engagé une vaste réforme de l’identification et de la traçabilité des ovins et des caprins, et imposé la généralisation des puces électroniques au nom de la « traçabilité », de la sécurité alimentaire et même, affirme-t-elle, de la protection de l’environnement. Depuis 2010-2011, l’identification des animaux domestiques et d’élevage est devenue obligatoire. Tous les chats nés après le 1er janvier 2012 doivent ainsi être tatoués ou – de plus en plus fréquemment – dotés d’une puce électronique (ou transpondeur) insérée sous la peau. La plupart des personnes n’ont sans doute pas entendu parler de cette mesure et ne se soucient guère de son application. Depuis le 1er juillet 2010, le puçage électronique des animaux d’élevage a également été rendu obligatoire pour toutes les nouvelles naissances d’ovins et de caprins. Cette mesure suscite, dans un silence assez général, l’opposition d’éleveurs qui veulent préserver leur existence et leur mode de vie.
L’électronisation, stade suprême de l’industrialisation
La généralisation du puçage des bêtes d’élevage à laquelle nous assistons couronne deux siècles de mutations et d’industrialisation de l’agriculture. Jusqu’au milieu du XIXe siècle, l’élevage était complètement intégré au travail paysan. Les animaux étaient les partenaires des hommes, ils appartenaient au même monde mental et affectif. Animaux et paysans habitaient les mêmes maisons, travaillaient ensemble et subissaient en grande partie une condition partagée face aux élites dominantes. Cette proximité est très bien montrée par les historiens qui s’intéressent de plus en plus l’évolution de la condition animale et qui montrent toute l’importance d’intégrer les bêtes dans l’histoire des sociétés humaines.
Au XIXe siècle, l’agriculture, et la nature dans son ensemble, sont progressivement apparues comme des réserves de profits laissées en friche par des paysans routiniers. L’élevage commence alors à se transformer, dans les représentations comme dans les faits, en « productions animales ». L’animal devient une « machine » au même titre qu’un haut fourneau ou une mécanique textile, une machine vivante dont il faut extraire le maximum en utilisant toutes les ressources de la science, en leur appliquant les méthodes d’organisation du travail du taylorisme et de la grande usine. La « zootechnie », qui naît à cette époque, a pour mission de faire de l’élevage une activité rentable pour les industriels et pour la nation, elle est une science nouvelle qui entend appliquer à « la production animale » les principes de « la science expérimentale ». L’animal est pensé comme machine productive au moment même où le culte des machines s’impose partout. La finalité doit être le rendement et les zootechniciens se considèrent comme les « ingénieurs des machines vivantes ». Les bêtes elles-mêmes changent physiquement : plus grandes, plus lourdes, plus productives : une vache moyenne pesait 300 kg au milieu du XIXe siècle contre 500 kg dans l’entre-deux-guerres, certaines races atteignent des records comme la Limousine qui passe de 300 à 900 kg.
Depuis 1945, le processus s’est considérablement accéléré. Comme les semences qui sont de plus en plus contrôlées – on interdit l’échange de celles qui n’ont pas reçu d’agrément – les animaux doivent être contrôlés, surveillés, agréés. De plus en plus, seuls les mâles conformes génétiquement doivent être employés pour la reproduction, et toutes les évolutions vont dans le même sens : la mise en place d’une filière très productive, rationalisée, fondée sur l’application des dernières méthodes scientifiques et des dernières technologies. L’Etat, l’Europe et les grands industriels du secteur font cause commune au nom de la défense de l’intérêt public pour les premiers, et de l’accroissement de leurs profits pour le second.
Résistances et protestations
Pourtant, de nombreux éleveurs dénoncent cette grande transformation en cours. En dépit de leur dispersion et de leur faible capacité à se faire entendre, les oppositions à cette électronisation et ses effets s’accroissent. Dans un bilan consacré à l’avancée de l’identification électronique rédigé en juillet 2013, les autorités estimaient qu’au 1er janvier 201 environ 75% des reproducteurs ovins et caprins portaient désormais « une boucle électronique ». Pourtant, seuls 13 833 exploitations avaient électronisé leurs troupeaux à 100%, soit 15% de l’ensemble des 93 387 exploitations recensées en France. Ce sont surtout les exploitations les plus grosses, les plus concentrées, qui ont franchi le pas. Dans ce secteur où domine la masse des petits troupeaux, la plupart des éleveurs repoussent en effet cette électronisation et dénoncent ses effets.
Le collectif « Faut pas pucer » notamment, qui milite contre la généralisation du puçage, appelait dès 2011 à un boycott de cette pratique. Alors que « l’identification électronique » se généralise peu à peu, la lutte des éleveurs – apparemment limitée ou sectorielle – acquiert la dimension d’un combat universel. En 2012, des groupes d’opposants se mettent en place et des rencontres ont lieu dans le Tarn, les Alpes-de-Haute-Provence ou en Ariège. Dans ces régions de montagne où subsiste un élevage à taille humaine, des éleveurs se réunissent et organisent des marches pacifiques et diverses actions de désobéissance.
En février 2012, « faut pas pucer » a ainsi organisé « une manifestation citoyenne » à Albi afin « de faire prendre conscience aux gens, et également aux fonctionnaires qui appliquent les directives, des conséquences d’une information forcenée telle qu’elle a lieu de nos jours ». En décembre 2012 une déclaration sur le « refus du puçage électronique des animaux d’élevage » est adoptée, des appels à la désobéissance sont lancés pour inviter les citoyens à soutenir les éleveurs qui s’opposeraient à la mesure. Un collectif d’éleveurs basques voit aussi le jour en avril 2013, alors que des protestations émergent dans les autres pays européens comme l’Allemagne. La confédération paysanne a réuni, en octobre 2013, 800 signatures d’éleveurs sur une pétition remise à la préfecture.
Au nom de l’hygiène et de la sécurité
Les raisons de s’opposer sont nombreuses. La généralisation de l’identification électronique des bêtes n’est pas une simple mesure neutre, qui irait dans le sens du progrès à travers l’application de l’informatique et de ses outils au service de l’amélioration de l’hygiène et de la sécurité. Il s’agit d’abord d’une mesure profondément politique en ce sens qu’elle transforme le monde, privilégie certains intérêts aux dépens d’autres. Elle favorise ainsi les industriels de la viande contre les petits éleveurs. Les entreprises d’abattage et les plus gros éleveurs ont d’ailleurs été les précurseurs et les principaux gagnants du puçage, et ils ont beaucoup investi dans l’identification électronique. La réglementation européenne accentue la crise du petit élevage au profit des plus gros, beaucoup d’agriculteurs semblent en effet préférer l’abandon de l’élevage d’appoint des petits ruminants plutôt que de courir le risque de perdre les primes octroyées à l’exploitation céréalière qui assurent la viabilité de leur entreprise. Le chantage aux subventions fonctionne ici à plein.
Les raisons de s’opposer à l’électronisation de l’élevage sont nombreuses. Cette réglementation entraîne ainsi un surcoût considérable – de l’ordre de 18 millions d’euros en France – difficile à supporter pour les petits éleveurs déjà en difficulté. L’opposition se fait aussi au nom de la lutte contre l’agriculture productiviste qui a déjà mille fois montré ses limites et dangers ; au nom de la défense des petits troupeaux qui jouent un rôle si important pour la préservation de la vie sociale des petites communes comme des paysages ruraux – pensons simplement à la façon dont les pâturages, en maintenant les milieux ouverts, favorisent la biodiversité et contribuent à limiter les risques d’incendie.
Pour beaucoup d’éleveurs, l’hostilité à l’informatisation tient aussi au refus de l’encadrement excessif et à la défense de leur dignité. « L’électronisation des brebis », n’a en effet aucune utilité pour les éleveurs car le puçage d’abord d’un souci d’optimisation du cheptel et de la main-d’œuvre humaine par les entreprises du secteur. Comme le montre notamment la sociologue Jocelyne Porcher dans son travail sur l’élevage, ici la technique n’est pas mise au service des intérêts de certains groupes industriels, dans la continuité des mutations qui ont affecté l’élevage depuis deux siècles. A travers cette mesure technique apparemment neutre, ce sont les liens d’affection et d’échange, qui caractérisaient la relation de l’éleveur et de ses bêtes, qui sont mis à mal au profit d’un processus d’industrialisation toujours plus poussé.
Les systèmes techniques visant à la traçabilité des bêtes, au nom de l’hygiène, de la sécurité alimentaire, voire de la protection de l’environnement, sont un exemple caricatural du gigantesque processus de technologisation en cours et des résistances qu’il suscite. Ici comme dans de nombreux autres secteurs, les outils électroniques tendent à faire des acteurs humains de purs gestionnaires, des techniciens réduits au rôle d’appendices du macro-système industriel. A cet égard, l’expérience des éleveurs et leur combat actuel a une valeur plus générale, elle témoigne de l’informatisation à marche forcée du monde, de ses mécanismes coercitifs, de la difficulté à s’y opposer alors qu’elle est présentée comme l’évolution naturelle vers une société plus sécurisée et mieux organisée.
La Décroissance N°106
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Festival d'Avignon et FN : Olivier Py ferait mieux de se taire
Le directeur du Festival d'Avignon a menacé de déménager la manifestation si le FN était élu. Peut-on imaginer une déclaration plus inepte et dangereuse ?
"Je ne vois pas comment le festival pourrait vivre à Avignon avec une mairie Front national, ça me semble inimaginable", a déclaré lundi, au lendemain du premier tour des élections municipales, Olivier Py, directeur du Festival d'Avignon. "L'édition 2014 aurait lieu parce que tout est déjà engagé, mais, pour la suite, si le Front national l'emportait, je prendrais mes responsabilités", a-t-il ajouté. Peut-on imaginer une prise de position plus stupide, plus irresponsable et plus contreproductive que celle-ci ?
Ainsi, sous prétexte qu'un petit tiers des Avignonnais pourrait voter pour un candidat du Front national (il devrait y avoir une quadrangulaire au second tour), l'ensemble des habitants de la ville serait privé du festival installé ici depuis 1947. Quelle belle preuve de tolérance et d'ouverture d'esprit que de couper la culture - comme on coupe le gaz ou l'électricité - à des gens qui ne pensent pas comme vous ! Ce serait ainsi le meilleur moyen d'assurer une élection triomphale au nouvel édile. Bars et restaurants de la ville réalisent en juillet 50 % de leur chiffre d'affaires annuel. Les priver de ces trois semaines de festival, c'est les précipiter dans la paupérisation et inciter les hésitants à voter, justement, pour le FN, devenu premier parti politique dans les couches populaires.
Le raisonnement inverse serait le bon
Olivier Py a-t-il conscience que l'on vient au moins autant au Festival d'Avignon pour l'exceptionnelle beauté des lieux et pour la richesse patrimoniale de la ville que pour la programmation, régulièrement critiquée ? Quelle ville peut offrir tant de lieux de représentation, allant de la cour d'honneur du Palais des papes aux dizaines de salles qui, à l'année, accueillent troupes et comédiens : le théâtre des Carmes, le théâtre du Chêne noir, le théâtre des Halles, le théâtre du Balcon, le théâtre du Chien qui fume, Fraction, le Théâtrographe, la Fabrikthéâtre... Nulle part ailleurs il ne trouvera un tel microclimat, de telles infrastructures, un tel patrimoine ! Souhaitons-lui bonne chance s'il veut déménager le festival (qui n'est pas le sien) à Arles, Nîmes, Aix-en-Provence ou Beaucaire !
On pourrait suggérer à M. Py le raisonnement inverse : c'est justement là où le FN sévit que la culture devrait être considérée comme prioritaire. S'il estime que ces électeurs sont des incultes dépourvus de sens politique, alors ce sont justement les oeuvres qui peuvent les amener, pédagogiquement, à réaliser que le repli sur soi n'est pas une solution. La littérature est une plaidoirie superbe pour la tolérance et le respect de la différence. S'il voulait s'affranchir des réflexes pavloviens du prêt-à-penser parisien, Olivier Py devrait faire la déclaration inverse : "Le FN risque de passer à Avignon, ma mission d'homme de théâtre, de propagateur de la culture, d'aiguillon des différences, est plus que jamais indispensable à cet endroit, auprès de ces gens."
L'exemple des Chorégies d'Orange
Lorsque Jacques Bompard fut élu a Orange en 1995, la direction des Chorégies montra ses muscles. Un an plus tard, les loups étaient devenus des agneaux. Les murs de l'amphithéâtre antique sont irremplaçables ! Depuis les Romains, ils avaient entendu bien des bêtises, celle-ci ne les ébranlera pas plus. Presque vingt ans plus tard, les Chorégies d'Orange continuent d'attirer mélomanes, hommes d'affaires et le Tout-Paris. La ville et l'association qui organise ce festival cohabitent en bonne intelligence.
Olivier Py a beau faire tourner son sabre de bois, il fait plus pitié que peur. Pire, il portera une grande responsabilité si dimanche prochain Philippe Lottiaux est élu maire d'Avignon. Sa sortie irréfléchie est le symbole de ce que les électeurs ne veulent plus : une prise de position intempestive de la France d'en haut nantie et aveugle devant l'exaspération du peuple. Quand on réside un mois par an dans une ville, que l'on s'y déplace en voiture avec chauffeur, que l'on a table ouverte dans les hôtels et les restaurants du département, on n'a guère de crédibilité pour faire une sortie aussi dogmatique et bêtement politisée. Quand le monde de la culture est plus intolérant que ceux qu'il combat, il sort de son rôle et s'entête sur la voie du discrédit.
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Telepopmusik - Smile
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Vos belles consciences ont l'odeur... du napalm
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Le Docteur Villermé et les esclaves du libéralisme
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En pleine visite du président chinois, le post controversé d'un responsable de la com' de Matignon
Philippe Guibert a publié, sur Facebook, ce message : "Bienvenue au bon président Xi Jinping", assorti de l'affiche du film "Les Chinois à Paris". Un long métrage parodique sur une invasion de la France par l'armée chinoise.
En pleine visite du couple présidentiel chinois en France, c'est un geste plutôt osé, et qui apparaît à beaucoup comme maladroit. Le Lab rapporte, vendredi 28 mars, que le directeur du service d'information du gouvernement, Philippe Guibert, a posté sur Facebook une illustration du film de Jean Yanne Les Chinois à Paris (1974). Il a utilisé cette image.
Dans ce long métrage parodique, les Chinois envahissent la France et installent leur quartier général aux galeries Lafayette. L'alcool et le sexe sont interdits, les voitures sont réquisitionnées. Le post de Philippe Guibert était accessible, jeudi, par des centaines de personnes. L'image et le message qui l'accompagnait, "Bienvenue au bon président Xi Jingping", ont été rapidement supprimés. Mais des captures d'écran sont remontées jusqu'à des hauts responsables de l'Elysée et de Matignon, raconte Le Lab. "C'est complètement hallucinant" Un "acteur clé de la communication de l'exécutif" a fait part de son étonnement au site d'information : "C'est complètement hallucinant. Je ne sais pas ce qui a pu lui passer par la tête au moment de publier cela." Et si Philippe Guibert estime auprès du Lab qu'il s'agit d'échanges privés, le communicant n'est pas de cet avis : "Ce n'est pas une conversation avec une personne dont on parle, mais avec plusieurs centaines."
Source
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Belle et rebelle
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Dieudonné : Municipales 2014
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Confédération paysanne : paysans et brebis au Louvre !
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Saint-Denis : les 46 Roms pourront voter
LE TRIBUNAL D'INSTANCE de Saint-Denis a confirmé, hier, l'inscription de 46 Roms sur les listes électorales. Ces habitants du terrain Voltaire, un village d'insertion situé au 55, route de La Courneuve, pourront donc voter aux prochaines élections municipales et européennes. « C'est une bonne nouvelle, merci au tribunal », a commenté Gari, l'un des habitants de ce campement de préfabriqués, situé derrière l'hôpital Delafontaine, à proximité de l'autoroute A 1.
Dans ce village aménagé avec l'aide de la ville, sur un terrain prêté par l'Etat, vivent un peu plus de 200 personnes, dont près de 150 en âge de voter. Tous résident à Saint-Denis depuis plus de cinq ans et la plupart viennent de l'ancien bidonville du Hanul, évacué en 2010.
C'est le cas de Stefan, qui vient du village roumain de Tulcea, comme la plupart des Roms de Voltaire. « J'ai gagné mon droit, maintenant mon vote est libre », confie-t-il, dans un Français approximatif, devant son habitation proprette, équipée de l'électricité et de la télévision par satellite. Un peu plus loin, Gari ouvre la porte de son logement. Ses deux enfants, scolarisés en maternelle et en CE2 à l'école Joliot-Curie, s'amusent dans la petite chambre. Lui est arrivé en France en 1992. Pour la première fois, il votera dimanche. « C'est un droit normal pour chaque citoyen européen. Je ne comprends pas que le député ait voulu nous l'interdire. Saint-Denis est habitué aux Roms, nous ne sommes pas un problème. La ville a d'autres soucis plus importants que nous, dans les hôpitaux, les écoles... »
L'inscription des Roms du terrain Voltaire était contestée par un recours déposé par le député PS et candidat aux municipales, Mathieu Hanotin. Celui-ci dénonçait le caractère collectif de ces inscriptions, pour 46 d'entre eux, sur les 82 inscrits sur les listes. « Ces inscriptions groupées constituent une rupture d'égalité par rapport à d'autres citoyens qui ont vu leur inscription refusée », estime-t-il.
Hier, le juge lui a notifié l'irrecevabilité de sa demande, au motif que son recours a été formulé plus de 10 jours après le dépôt des listes. « Je prends acte de ce jugement, qui porte sur la forme. J'ai fait une erreur, mais sur le fond, ma demande n'était pas illégitime », indique Mathieu Hanotin, qui ne compte pas se pourvoir en cassation.
La polémique sur l'inscription de ces habitants de nationalité roumaine avait pris un tour politique à quelques jours du 1 er tour des municipales. « Soit Mathieu Hanotin n'avait pas connaissance des délais de recours et c'est de l'incompétence, soit il a fait ce recours sciemment pour stigmatiser les populations roms et c'est de la malveillance », a réagi Patrick Braouezec, président (Front de gauche) de Plaine Commune et numéro 3 sur la liste du maire sortant (PC) Didier Paillard.
« Les habitants ont été blessés par cette polémique, indique Agnès Cluzel, membre du Mrap (Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples) et du collectif de soutien aux Roms de Voltaire. Aujourd'hui, c'est une bonne nouvelle. Ils vont pouvoir voter, c'est une fierté pour eux. »
Source
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Chantage et vengeance : les voilà, leurs fameuses « valeurs républicaines » !
On sait désormais ce que sont ces « valeurs républicaines » que la quasi-totalité de la classe politique ne cesse de jeter à la face du Front national…
Ça y est, on sait désormais ce que sont ces omniprésentes « valeurs républicaines » que la quasi-totalité de la classe politique ne cesse de jeter à la face du Front national… On en arrivait à se demander si elles existaient vraiment…
Tout d’abord, grâce à Olivier Py, directeur du festival d’Avignon, indigné par le succès du candidat frontiste Philippe Lottiaux (il a devancé d’une courte tête la candidate socialiste dimanche soir, lors du premier tour des élections municipales) : « 30 % au FN, je ne reconnais pas ma ville. »« Sa » ville, allons bon ! Comme étaient sans doute « ses » villes précédentes : Orléans, dont il était en 1997 le directeur du Centre dramatique national… ou encore Paris où il dirigeait le Théâtre national de l’Odéon en 2007 !
« Sa » ville, donc ! Comme « sa » conception du suffrage universel… et « ses valeurs républicaines » : « Je ne me vois pas travaillant avec une mairie Front national. Cela me semble tout à fait inimaginable […] Je n’envisage que deux solutions possibles : soit je démissionne et on nomme un nouveau directeur ; soit on délocalise le festival dans une autre ville. »
Du chantage aussi, donc… Et ce ne sont pas les autres autoproclamés propriétaires des « valeurs républicaines » que sont les responsables d’Europe Écologie Les Verts qui le démentent : non seulement ils viennent de négocier âprement un accord de fusion de liste à Paris grâce à leurs bons résultats suite au récent pic de pollution dans la capitale – 8,86 % au total, passant les 10 % dans neuf arrondissements et en position de conserver la mairie du IIe –, mais surtout, à Nantes, la liste socialiste de Johanna Rolland et la liste EELV de Pascale Chiron vont fusionner.
Nantes où Johanna Rolland, adoubée par l’ex-maire, est certes arrivée en tête avec 34,51 %, mais n’a pas réussi à l’emporter dimanche dernier, faute justement d’union avec les écologistes au premier tour des municipales, une première depuis l’arrivée à l’hôtel de ville de Nantes de Jean-Marc Ayrault en 1989.
« La question du projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, auquel s’oppose EELV tandis qu’il est soutenu par les socialistes, est une de leurs principales pommes de discorde et elle a été longuement discutée pour aboutir à une fusion des listes. Les négociations entre les deux équipes de campagne, entamées dès dimanche soir, ont duré toute la journée de lundi et jusqu’en milieu de soirée », rapporte Le Figaro.
On imagine aisément ce qu’il en a été : les écologistes viennent en aide aux socialistes pour que ceux-ci ne risquent pas de perdre cette ville symbole… à condition, donc, que l’aéroport soit purement et simplement enterré !
Jean-Marc Ayrault s’était obstiné, pourtant, dans ce projet. Quelle importance désormais ? Il est désormais tellement « à la ramasse » qu’il n’en est plus à cela près !
Après avoir avalé deux ans durant tant et tant de couleuvres de la part de leurs « alliés » socialistes, on imagine la gourmandise avec laquelle EELV vient ainsi de leur rendre la pareille.
Concernant leurs « valeurs républicaines », il faut à l’évidence ajouter la vengeance au chantage. Rien que du beau monde, tout ça…
Source
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The Kingbees - Rockin' My Life Away
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Belle et rebelle
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Dilemme cornélien
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Journal des guerres civiles : Pendant ce temps-là en Espagne...
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Pour Jacques Testart, "le risque de l'eugénisme se précise"
Trente-deux ans après avoir fait naître Amandine, premier « bébé éprouvette » français, le biologiste Jacques Testart appelle à la démédicalisation de la procréation. Dans un nouvel et passionnant essai (Faire des enfants demain, au Seuil), il alerte sur les risques de basculer avant la fin du siècle dans un eugénisme d'ampleur inédite dans l'histoire de l'humanité.
L'assistance médicale à la procréation (AMP) va devenir, dites-vous, la façon pour tous de faire ses enfants. Pourquoi ?
Parce que nous allons vraisemblablement être capables de produire sans limites des gamètes à partir de cellules banales. C'est une révolution biologique car jusqu'à présent, on connaît deux lignées bien distinctes : les banales cellules somatiques, et les cellules germinales. Or voilà que les Japonais et les Coréens, notamment à partir des travaux du prix Nobel Shinya Yamanaka, nous montrent sur la souris qu'on peut fabriquer l'une à partir de l'autre. Pour l'ovule cela va tout changer, car c'est la cellule la plus rare ! On va donc être en mesure de produire des embryons in vitro par centaines, et de recourir au DPI (diagnostic pré-implantatoire) pour choisir et transplanter celui qui présente le moins de défauts. L'AMP, qui est actuellement un parcours du combattant, va devenir indolore et sans astreinte puisqu'il suffira de laisser quelques unes de vos cellules de peau au laboratoire. Celui-ci procédera à la transformation cellulaire, puis à la fécondation, à des tests génétiques, et appellera le couple pour le transfert de l'embryon qui aura été choisi. Les couples pourront aussi se faire stériliser pour ne plus avoir à se soucier de contraception : ils pourront quand même procréer quand ils le veulent. Et deuxième révolution : celle de la génétique avec la détection de caractéristiques innombrables, et de l’outil informatique pour en déduire des prédispositions. Il n'y a donc pas de raison que l'AMP ne devienne pas une façon normale de fabriquer sérieusement des bébés, plutôt que de laisser faire le hasard.
Ne peut-on pas imaginer que le bon sens limite les gens ?
Je constate au contraire que les gens s'accoutument à tout. Dès les débuts de l'AMP, j'ai alerté sur le fait qu'à partir du moment où on avait accès à l'embryon avec neuf mois d'avance par rapport à la naissance et où on en disposait en nombre, on en viendrait à faire du tri. Il y a trente ans le grand public était bouleversé par mes propos. Aujourd'hui, j'ai beaucoup plus d'arguments pour montrer que le risque se précise, mais on me traite d'ayatollah. C'est logique : les gens ont peur d'avoir un enfant anormal depuis toujours; à partir du moment où c'est faisable, ils ne voient pas pourquoi y renoncer. Au départ, le DPI n'est prévu que pour des parents porteurs de maladies graves. Mais comme on sait que souvent un tiers des maladies graves surviennent par une mutation génétique non héritée des parents, on ne voit pas pourquoi on ne se proposerait pas le DPI à tous les parents, pour rechercher toutes les maladies possibles. Cette logique est imparable, on ne peut que l'accepter ou la rejeter en bloc. Seule la pénibilité actuelle de la FIV limite la médicalisation généralisée.
Qu'est-ce que cela va changer pour l'espèce humaine ?
Quand tout le monde fera son bébé au labo, on prendra l'embryon à disposition qui a le moins de problèmes. Or les problèmes sont les mêmes aux yeux de tous : on éliminera les fortes probabilités de diabète, de cancer, mais on en profitera aussi pour se débarrasser de maux plus bénins; sans parler de choix dans l'esthétique, la taille, le poids. Cela n'est envisageable que si nous avons à disposition une population importante d'embryons. Naturellement, seulement un ovocyte sur 10 000 se transforme en ovule, les autres dégénèrent avant maturité. A partir du moment où on pourra obtenir pour un couple des centaines d'embryons, cela change tout. Car l'eugénisme ne travaille que sur l'effectif. Dès lors on va chercher à améliorer l'humanité, au sens où on va éliminer le maximum de défauts. Ce risque est bien plus concret que la perspective de l'« homme augmenté » par des puces électroniques – l'électronique, ce n'est pas héréditaire !
Le problème c'est la question de la santé de l'enfant à naître paraît aujourd'hui un argument indiscutable
Oui. Et pourtant à partir d'un tri embryonnaire fondé sur l'idée de santé, on va faire de la normalisation. Car qu'est ce que c'est qu'une pathologie ? Aucun individu n'est anormal en tant que tel, il ne l'est que par rapport au regard d'une société. Or notre vision du normal se restreint toujours davantage. Le seul fait de trier va amener la population a être de plus en plus conforme génétiquement à un modèle –forcément arbitraire. Au bout d'un certain nombre de générations on aura tous un génome à peu près identique. On va faire du clonage social sans passer par le clonage. Mettre fin à la diversité, c'est un changement d'humanité.
L'assistance médicale à la procréation (AMP) va devenir, dites-vous, la façon pour tous de faire ses enfants. Pourquoi ?
Parce que nous allons vraisemblablement être capables de produire sans limites des gamètes à partir de cellules banales. C'est une révolution biologique car jusqu'à présent, on connaît deux lignées bien distinctes : les banales cellules somatiques, et les cellules germinales. Or voilà que les Japonais et les Coréens, notamment à partir des travaux du prix Nobel Shinya Yamanaka, nous montrent sur la souris qu'on peut fabriquer l'une à partir de l'autre. Pour l'ovule cela va tout changer, car c'est la cellule la plus rare ! On va donc être en mesure de produire des embryons in vitro par centaines, et de recourir au DPI (diagnostic pré-implantatoire) pour choisir et transplanter celui qui présente le moins de défauts. L'AMP, qui est actuellement un parcours du combattant, va devenir indolore et sans astreinte puisqu'il suffira de laisser quelques unes de vos cellules de peau au laboratoire. Celui-ci procédera à la transformation cellulaire, puis à la fécondation, à des tests génétiques, et appellera le couple pour le transfert de l'embryon qui aura été choisi. Les couples pourront aussi se faire stériliser pour ne plus avoir à se soucier de contraception : ils pourront quand même procréer quand ils le veulent. Et deuxième révolution : celle de la génétique avec la détection de caractéristiques innombrables, et de l’outil informatique pour en déduire des prédispositions. Il n'y a donc pas de raison que l'AMP ne devienne pas une façon normale de fabriquer sérieusement des bébés, plutôt que de laisser faire le hasard.
Ne peut-on pas imaginer que le bon sens limite les gens ?
Je constate au contraire que les gens s'accoutument à tout. Dès les débuts de l'AMP, j'ai alerté sur le fait qu'à partir du moment où on avait accès à l'embryon avec neuf mois d'avance par rapport à la naissance et où on en disposait en nombre, on en viendrait à faire du tri. Il y a trente ans le grand public était bouleversé par mes propos. Aujourd'hui, j'ai beaucoup plus d'arguments pour montrer que le risque se précise, mais on me traite d'ayatollah. C'est logique : les gens ont peur d'avoir un enfant anormal depuis toujours; à partir du moment où c'est faisable, ils ne voient pas pourquoi y renoncer. Au départ, le DPI n'est prévu que pour des parents porteurs de maladies graves. Mais comme on sait que souvent un tiers des maladies graves surviennent par une mutation génétique non héritée des parents, on ne voit pas pourquoi on ne se proposerait pas le DPI à tous les parents, pour rechercher toutes les maladies possibles. Cette logique est imparable, on ne peut que l'accepter ou la rejeter en bloc. Seule la pénibilité actuelle de la FIV limite la médicalisation généralisée.
Qu'est-ce que cela va changer pour l'espèce humaine ?
Quand tout le monde fera son bébé au labo, on prendra l'embryon à disposition qui a le moins de problèmes. Or les problèmes sont les mêmes aux yeux de tous : on éliminera les fortes probabilités de diabète, de cancer, mais on en profitera aussi pour se débarrasser de maux plus bénins; sans parler de choix dans l'esthétique, la taille, le poids. Cela n'est envisageable que si nous avons à disposition une population importante d'embryons. Naturellement, seulement un ovocyte sur 10 000 se transforme en ovule, les autres dégénèrent avant maturité. A partir du moment où on pourra obtenir pour un couple des centaines d'embryons, cela change tout. Car l'eugénisme ne travaille que sur l'effectif. Dès lors on va chercher à améliorer l'humanité, au sens où on va éliminer le maximum de défauts. Ce risque est bien plus concret que la perspective de l'« homme augmenté » par des puces électroniques – l'électronique, ce n'est pas héréditaire !
Le problème c'est la question de la santé de l'enfant à naître paraît aujourd'hui un argument indiscutable
Oui. Et pourtant à partir d'un tri embryonnaire fondé sur l'idée de santé, on va faire de la normalisation. Car qu'est ce que c'est qu'une pathologie ? Aucun individu n'est anormal en tant que tel, il ne l'est que par rapport au regard d'une société. Or notre vision du normal se restreint toujours davantage. Le seul fait de trier va amener la population a être de plus en plus conforme génétiquement à un modèle –forcément arbitraire. Au bout d'un certain nombre de générations on aura tous un génome à peu près identique. On va faire du clonage social sans passer par le clonage. Mettre fin à la diversité, c'est un changement d'humanité.
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Espagne : les musulmans attaquent la messe "discriminatoire" pour les victimes du terrorisme islamique
Il y a deux semaines, l’Espagne a commémoré le dixième anniversaire des attentats de Madrid du 11 mars 2004, le plus sanglant de son histoire. Des islamistes marocains avaient fait sauter quatre trains (photo d’une partie de l’un des trains, cliquer sur l’image pour l’agrandir), faisant 192 morts et 1900 blessés. À l’initiative des associations de victimes, une messe a été célébrée à la cathédrale de l’Almudena, en présence du roi Juan Carlos, de la reine Sofia et du chef du gouvernement, Mariano Rajoy.
Mounir Benjelloun, président de la Comisión Islámica de España, s’est senti « discriminé » et s’en est plaint à l’agence Servimedia. « Les victimes catholiques, s’est-il indigné, sont les seules à qui on rende hommage selon leurs rites. Il aurait dû y avoir une cérémonie avec toutes les religions ou, sinon, une cérémonie civile. Les musulmans aussi ont souffert du terrorisme et ils méritent d’être respectés ».
Mounir Benjelloun a obtenu le soutien des protestants évangéliques ainsi que des associations laïcistes, qui ont qualifié cette cérémonie catholique d’ « anachronique ». Le théologien catholique progressiste, Juan José Tamayo Acosta (lauréat en 2010 du grand prix « Islam et Vivre-ensemble » des associations musulmanes d’Espagne), a dénoncé de son côté « ces restes de national-catholicisme ». La célébration d’une messe témoigne, selon lui, de « l’absence de toute sensibilité interreligieuse et interculturelle ».
Les représentants de la communauté orthodoxe, en revanche, ont assisté à la messe catholique et ont déclaré y avoir été très bien accueillis. « En Espagne, a expliqué Andrey Kordochain, curé de l’église orthodoxe russe de Madrid, on ne peut pas ignorer la présence de l’Eglise catholique, de son histoire et de sa culture. En outre, une cérémonie religieuse est beaucoup plus émouvante qu’une cérémonie laïque. »
Pour « rétablir l’équilibre entre les confessions religieuses », Mounir Benjelloun vient de rendre publique la lettre qu’il a adressée à Mariano Rajoy ainsi qu’au ministre de la Justice, Alberto Ruiz Gallardón. Il y réclame des dédommagements pour « les descendants des morisques » expulsés d’Espagne en 1603, qu’il se propose d’aider à identifier et localiser. Pour commencer, comme on n’est jamais si bien servi que par soi-même, Benjelloun demande « la cession d’un immeuble public » où la Comisión Islámica de España puisse établir son siège, « afin de rendre plus digne la représentation de l’Islam en Espagne ».
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Gloria JMJ
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Amor patria nostra lex
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